Christian Settipani dans "La Préhistoire des Capétiens", et à partir d'éléments précis, semble considérer que Dudon de Saint-Quentin n'était pas exempt d'erreurs. Il relève notamment que l'auteur normand affirmait dans le même temps d'une part que Rollon avait épousé Poppa de Bayeux fille de Bérenger, d'autre part que Guillaume Longue- Epée fils de Rollon et de cette Poppa avait pour oncle maternel Bernard de Senlis. Il y a donc là une contradiction qui ne plaide pas pour Dudon. Est-ce suffisant pour autant pour accepter le choix de la chronique normande? Je ne sais, et il me paraît prudent que quelle que soit la réponse que vous retiendrez vous assortissiez votre fiche sur Popa d'un point d'interrogation avec éventuellement une note de commentaire.

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Voici le texte complet de la note de C. Settipani sur Poppa :

"Une chronique normande du XI° siècle nous apprend... que le comte de Rouen Rollon épousa la fille du comte Wido de Senlis ("Mortua est Gilla, absque omni prole, et Rollo duxit Popam uxorem, filiam Widonis comitis Silvanectensis, sororem Bernardi de qua genuit Willelmum"). Or, Dudon de Saint-Quentin, le premier chroniqueur normand (1015-1026) dit d'une part que Rollon avait épousé Poppa de Bayeux, fille du comte Berenger (Dudon, De gestis normanniae ducum... , II, 16), et d'autre part que Guillaume Longue-Epée, fils de Rollon, avait pour oncle maternel Bernhard de Senlis ("ad avunculum meum Bernardum Silvanectensem"). On néglige en général les données de la chronique en faveur de Dudon, qui tenait ses informations, nous dit-il, d'un frère utérin du petit-fils de Rollon. Toutefois, Dudon a commis suffisamment d'erreurs et écrivait suffisamment longtemps après les évènements pour qu'on ne puisse pas la considérer comme infaillible. Pour le biographe de Rollon, D.C.Douglas, toute l'histoire de Rollon, chez Dudon, avant son arrivée en France est fantaisiste, et cela inclut notamment Poppa "de Bayeux". Concernant les alliances de Rollon, ne nous dit-il pas que Rollon aurait eu comme première épouse en 912, juste après son baptême par l'évêque Franco de Rouen, Gisela, fille du roi Charles, "de haute taille, pleine de grâce, prudente dans ses conseils, d'une conversation agréable, d'un caractère aimant, habituée aux travaux domestiques, bref la plus accomplie des jeunes filles". Malheureusement, Gisela, fille de Charles et de Frederuna, mariés en 907, n'avait au mieux que 5 ans en 912, et sans doute même était-elle plus jeune, voire même pas encore née. Quant à l'évêque de Rouen en 912, il s'agit de Wido et non de Franco, son successeur. Il y a tout lieu de craindre que Dudon se soit inspiré ici du baptême d'un autre scandinave, Godfrid, en 881, par l'évêque Franco de Liège, et qui épousa ensuite Gisela, fille du roi Lothaire. Quant à la mère même de Guillaume Longue-Epée, le récit de Dudon suivant lequel Rollon aurait épousé "à la danoise", en 885 à Bayeux, Poppa, fille du marquis Berenger, est contredit par une source quasi-contemporaine, du X° siècle, la Complainte sur la mort de Guillaume, d'après laquelle Guillaume était né outre-mer d'une mère chrétienne, son père étant encore païen :

"Hic in orbe transmarino natus patre

In errore paganorum permanente

Matre quoque consignata alma fide

Sacra fuit lotus unda."

D'ailleurs, Guillaume ne naquit sans doute que vers 905. De toute façon, comme l'a bien noté P. Lauer, Dudon se contredit puisque Guillaume Longue-Epée ne peut être à la fois le petit-fils de Berenger et le neveu maternel de Bernhard de Senlis, ce dernier n'étant évidemment pas le fils de Berenger. Force est donc de sacrifier l'une des deux informations données par Dudon. Les erreurs de ce dernier concernant les alliances de Rollon, le fait que les chroniques normandes postérieures en dépit de l'autorité de Dudon aient persisté à donner une autre origine à Poppa, nous semblent devoir privilégier indubitablement la seconde donnée. Comme d'autres auteurs avant nous, nous croyons que Rollon aurait eu vers 905, d'une femme peut-être nommée Poppa, sans doute une prise de guerre, fille du comte Wido de Senlis, et soeur de Bernhard de Senlis, son fils et héritier (Guillaume)."

(C. Settipani, "La Préhistoire des Capétiens", Tome I, p. 218-9)

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