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Muneville-le-Bingard - Notes historiques et archéologiques


Muneville-le-Bingard, Muevilla, Mulevilla, Munevilla.

L’église n’offre pas un grand intérêt. Le chœur et la nef sont voûtés en bois, et toutes les fenêtres qui les éclairent sont à ogive subtrilobée.

Il y a dans cette église deux chapelles. L’une d’elles est établie dans l’étage inférieur de la tour, et sa voûte est en pierre : une arcade à ogive la met en communication avec l’église. On remarque dans cette chapelle un autel qu’on fait remonter jusqu’au XVe siècle. La chapelle septentrionale est voûtée en bois : elle communique avec l’église par une arcade à ogive pointue.

Le mur absidal est droit. A l’occident, l’église est précédée d’un petit porche avec arceaux croisés du XVe ou XVIe siècle.

Le font baptismal est de forme carrée : chaque façade offre cinq petites arcades cintrées, et sur chacun des pans coupés, on distingue aussi une petite arcade.

La tour est massive, carrée, et couronnée d’un toit en bâtière. Son mur oriental est percé d’une fenêtre à ogive, à deux baies, avec meneau, et des compartiments qui annoncent le XVe siècle : cette fenêtre aura sans doute été ouverte lors de l’établissement de la chapelle.

L’église est sous le vocable de saint Pierre. Elle payait une décime de 170 livres, et dépendait de l’archidiaconé et du doyenné de la chrétienté. Le patronage appartenait au roi, et le curé était seul décimateur.

Dans le XIIIe siècle (1250), le comte de Boulogne avait le patronage de Muneville-le-Bingard. Le curé, qui, alors, était Ranulphe Le Loup, percevait les dîmes, moins la sixième gerbe qui, avec la moitié du casuel et la dîme de deux pièces de terre d’aumône, appartenait à maître Robert Lécrivain : Ranutphus Lupus rector percipit omnia, excepta medietate altalagii et sexta garba tocius decime et duabus peciis terre elemosine que percipit magister Robertus scriptor. Le curé faisait desservir sa cure par un vicaire, ce qui ne devait pas se faire : Et desservit ibi per vicarium quod fieri non débet. La cure valait au curé 110 livres ; la part du vicaire était de 40 livres : Et valet cx lb. item pro vicario xl lb. [1]

D’après une ancienne tradition que je n’ai trouvée appuyée sur aucun fait, ni sur aucune charte, il doit y avoir eu dans un temps à Muneville-le-Bingard un prieuré dépendant du Mont-Saint-Michel.

Faits Historiques

L’affixe Bingard ou plutôt Bigard, à la suite du mot Muneville, signifie en langue romane monticule. Il y a en effet, vers les landes, un lieu fort élevé, faisant partie de Muneville, et que les uns nomment le Bingard, et les autres le Bigard. On prétend qu’il y a eu dans cet endroit une vigie romaine. Arrivé sur la pointe du Bigard, on a devant soi, vers le nord, un horison immense.

Des auteurs anglais citent une famille normande du nom de Muneville, comme ayant existé en Angleterre dans le comté de Kent. Cette famille appartenait-elle à Muneville-le-Bingard ou à Muneville-sur-Mer ? Je n’ai trouvé sur ce point aucun renseignement ; mais, s’il y a eu une motte ou butte féodale, ce serait plutôt à Muneville-le-Bingard qu’à Muneville-sur-Mer qu’il faudrait la chercher.

Après la mort de Philippe, comte de Boulogne, en l’année 1233, [2] le comté de Mortain fut partagé. On voit par l’acte de partage que Muneville, Créances, La Feuillie, Geffosses, Saint-Sauveur, Gouville et Linverville, qui faisaient partie de ce comté, furent compris dans le premier lot que le roi choisit : Hec est prima lotia.... Munevilla, sanctus Salvator, Grimonvilla, Criencie, Folleia, Guinoufosse, Livervilla, Goouvilla,.... Dominas rex cepit istam lotiam.

La princesse Blanche, fille du roi du France, duchesse douairière d’Orléans, donna dans le mois de novembre de l’an 1391, à l’abbaye de Saint-Denis en France, des rentes, droits et revenus, ainsi que la moyenne et basse justice qui lui appartenaient dans la paroisse de Muneville-le-Bingard, dépendant du domaine et de la vicomté de Saint-Sauveur-Lendelin. Cependant la princesse se réserva la haute justice, ainsi que le patronage de l’église et le droit de présenter à la cure.

On trouve dans les archives du domaine de Saint-Sauveur-Lendelin une " reconnaissance, faite par Louis David, écuyer, sieur de Guéhébert, tant pour lui que demoiselle Jehanne Lepetiot sa femme, le premier juillet 1560, de dix livres de rentes dues en deux termes au domaine de Saint Sauveur Landelin à cause des héritages, domaines, manoir, colombier et moulin le tout scitué à Muneville le Ringard appartenant aud. s. Davy sous la mouvance des religieux de Saint Denis en France, à cause de la seigneurie de Muneville laquelle ledit sieur Davy a dit avoir été vendue et engagée à M. Philippe Lecrivain par les commissaires du roy. "

Un des successeurs de Louis Davy, Adrien Davy, écuyer, sieur de Muneville, rendit aveu au roi, le 15 mars 1680, d’un fief ou vavassorie appelé le Petit Pleune ou Plaine, situé sur les deux paroisses de la Ronde-Haye et de Muneville. Ce fief, d’une contenance d’environ 15 acres, se trouvait sous la mouvance du domaine de Saint-Sauveur-Lendelin, et lui devait quatre boisseaux de froment, à la mesure de Coutances, un pain, un chapon, au terme de Pâques et un denier d’hommage.

Adrien Davy, à l’époque de 1683, prenait les titres de seigneur et patron de Muneville-le-Bingard : quelques années ensuite on trouve Jacques de Cussy, écuyer, comme seigneur et patron. Les Davy qu’on rencontre à Muneville-le-Bingard appartenaient à la famille du cardinal Davy du Perron, et portaient aussi d’azur au chevron d’or, accompagné de trois harpes de même.

Dans le cours du XVIIe siècle, on comptait à Muneville deux fiefs nobles : le fief de Muneville-le-Bingard avec extension sur la Ronde-Haye et Saint-Sauveur-Lendelin, et le fief du Bingard. Ils appartenaient, le premier aux religieux de Saint-Denis, et l’autre aux religieux du Mont-Saint-Michel. On y trouvait aussi quatre moulins à eau : le moulin de Canteraine, d’un revenu de 100 livres, appartenait au sieur de Gonneville ; un moulin à foulon était fieffé 60 livres ; les deux autres valaient 800 livres. En l’année 1476, les moulins de Muneville se nommaient l’un le grand moulin, et l’autre le moulin de Canterayne.

Dans le même siècle, une contestation s’éleva entre les religieux de Saint-Denis et leurs vassaux de Muneville-le-Bingard, à l’occasion de l’élection du prévôt. Ce prêvot était, comme le sergent du seigneur, chargé de lui faire payer ses rentes ; son élection avait lieu dans les gages-plèges que le seigneur tenait en son fief. Le vassal, pour faire le service de prévôté, devait y être obligé par ses aveux, et avoir une masure ; cependant il pouvait se redimer de ce service en payant ce que l’on nommait le dixième denier. Les vassaux de la seigneurie de Muneville contestent aux religieux de Saint-Denis en France, qui possédaient cette seigneurie, le mode d’exercice dont ceux-ci voulaient faire usage pour le service de la prévôté. Un arrêt du parlement de Normandie, rendu en 1688, accueillit la prétention des vassaux, et fit défense au sénéchal de donner des aides au prévôt des religieux. [3] Les grandes abbayes, jalouses de leurs droits, rencontraient souvent dans les populations un esprit de résistance contre lequel elles échouaient.

On cite comme appartenant à l’ancienne chevalerie normande un seigneur nommé Le Bigard. Un Guillaume Le Bigard ou Bigars vivait dans le XIVe siècle ; il portait de gueules à une bande d’argent à croisette d’or. [4] Thomas du Bigard fut abbé de Saint-Sauveur-le-Vicomte, depuis l’an 1376 jusqu’à 1390. [5] J’indique ces noms, mais sans avoir trouvé la preuve qu’ils appartiennent à la paroisse de Muneville-le-Bingard.

Source :

Notes

[1] Voir le livre noir de l’évêché

[2] Anno Domini 1233, obiit Philippus cormes Boloniae flius Philippi regis. Guillaume de Nangis, dans les Historiens de France, tome XX, p. 322.

[3] Voir Basnage, sur l’art. 185 de la Coutume de Normandie.

[4] Dumoulin, Histoire de Normandie.

[5] Gall. christian., tom. IX, col. 924.