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Macey - Notes historiques et archéologiques


NDLR : texte de 1847, voir source en bas de page.


Cette commune se compose du territoire de deux paroisses, de celle de Macey et de celle de Cormeray [1] , aujourd’hui simple annexe. Le territoire de Cormeray, carré assez régulier, forme un appendice au sud-ouest de Macey, dont les limites sont, au nord une ligne droite tirée dans une lande, à l’ouest une ligne très-brisée, naturelle et arbitraire, à l’est le ruisseau de Demanche avec une ligne idéale. Macey est un sol généralement plat et humide, aussi porte-t-il quelquefois le nom de Macey-les-Étangs, comme la commune contiguë s’appelle Villers-le-Pré. D’autres noms sont dûs à la même nature du sol, Noyant, la Ferme-des-Prés, des terrains cités dans le Terrier du Mont, le Pré-des-Noes, le Clos-de-la-Moire, le Bouillon. On remarque encore dans le livre de fermages le fief au Potier, le fief au Boucher, le manoir au Lair, la Vigne-Minier. Toutefois, une partie de Macey est sur le point culminant du faîte qui sépare les bassins du Couesnon et de la Sélune, et c’est là que s’élève et s’arrondit cette coupole de verdure que l’on voit de presque tous les points de l’Avranchin, que le navigateur salue à l’horizon, que le Breton signale comme le point qu’il aperçoit le premier ou le dernier de la Normandie, la Foutelaie de Macey. [2]

Quand on approche de l’église, on remarque un cimetière sur une espèce de motte, une jolie croix historiée du XVIe siècle, une charpente à cloche, comme à Curey, une tour carrée, coiffée d’un dôme, de ce type moscovite, dont Saint-Gervais d’Avranches semble être le patron, et qui domine dans le canton de Pontorson et de Saint-James, une nef et un chœur du siècle dernier. Rien ne captiverait l’intérêt, n’était la grande fenêtre de l’orient. C’est un joli spécimen du flamboyant : c’est une baie divisée par deux meneaux en trois lances trifoliées, dont le tympan est rempli par une tracerie contournée. Elle encadre encore des vitraux qui représentent Jésus pasteur, Jésus crucifié, Jésus ressuscitant, avec un Paradis où volent deux anges, d’un coloris pâle et transparent, et au-dessous duquel sont des astres. Cette belle fenêtre est comme un pan de pampre sur des haillons, car l’intérieur est pauvre et délabré.

La cure de Saint-Sulpice-de-Macey appartenait aux religieux du Mont-Saint-Michel, à cause du franc-fief de Noyant qu’ils achetèrent en 1404. [3] D’après le Livre des Constitutions, cette église était taxée à 32 liv. 10 s. [4] En 1648 et en 1698, elle valait 300 liv. et il y avait un vicaire.

Les seigneurs de Macey ne nous sont pas connus dans leur série complète : nous en citerons quelques-uns. Un seigneur de la conquête, Hugo Maci, ou un de ses ancêtres, dénomma probablement cette paroisse, [5] qui signifie habitation de Maci, Maceium, d’après l’analogie générale et l’analogie des noms des localités circonvoisines. Cette localité fut donnée au Mont dans l’acte célèbre de G. Longue-Épée (917), selon les termes de notre épigraphe. Alueredus de Macci souscrivit à la charte de Huisnes dans le XIIe siècle. [6] Au XIVe siècle, Hamon et Rualem, seigneurs de Macey, devaient au Mont, pour le fief de Noyant, une partie de chevalier. Au commencement du XVe siècle, le Mont devint le patron de l’église. A la fin de ce siècle, le seigneur était Jean Le Roy, chambellan de Louis XI, qui le nomma, en 1487, vicomte d’Avranches ; [7] la famille des Le Roy avait encore la seigneurie dans le XVIe siècle. En 1617, René Le Roy, fils du seigneur de Macey, fut tué d’un coup d’épée, près de Pontorson, par ce Jean Guiton, le petit Jehannot, que nous verrons entre les genoux du prince de Condé, à Argouges, [8] capitaine des nefs rochelloises, dont la vie fut très-aventureuse. C’était une vendette de famille, parce que Dom Jean Le Roy, jacobin, avait tué, en 1589, le commandeur de Constance, allié de la famille Guiton. [9] En 1698, Henri et Gabriel Le Roy, et J. David, étaient les nobles de cette paroisse. [10] Dans la fin du siècle dernier, le château et la terre de Macey passèrent dans la famille de Bréménil, par M. Tesnière de Bréménil, qui administra comme maire Avranches dans la Révolution, et qui a laissé d’honorables souvenirs comme magistrat, et comme homme d’esprit et de goût.

Noyant était un des plus beaux fiefs du Mont. Il fut acquis des seigneurs, par un des plus illustres abbés, Pierre Le Roy, en 1404, ce qu’on lit dans le Gesta Petri Regis : « Et fuit acquisitum feoduni de Noyant. » [11] M. Stapleton a marqué ce lieu, sous le nom de Noant, dans sa carte de Normannia sub regibus Angliae. [12]

Il y a encore le Manoir, dont quelques parties ne manquent pas de caractère archéologique et monumental.

Annexe de l’église, section de la commune, Cormeray était autrefois paroisse, et avait son église et son manoir. Son église est une ecclesiola, flanquée d’antiques contreforts croulans, fendus par le lierre, et rongés par la mousse, les lichens et les asplenium. Ils datent sans doute de l’époque romane. La seconde époque est le XVe siècle, que représente la grande fenêtre orientale. Le portail, cintre rustique, est du XVIe siècle. Dans l’intérieur sont de vieilles statues. Ce qu’il y a de plus frappant, c’est un autel du siècle dernier, qui se distingue de ses analogues par son luxe d’ornementation : ce sont des colonnes torses autour desquelles s’enroulent et grimpent des pampres vigoureux chargés de grappes gonflées, des niches ornées de coquilles, des pots à feu, des volutes, des festons, enfin « toutes les fantaisies coquettes de l’architecture rocaille et chicorée, » [13] ou plutôt « cette lèpre d’oves, de volutes, d’entournemens, de draperies, de guirlandes, de franges, de flammes, d’amours replets, de chérubins bouffis qui commence à dévorer la face de l’art dans l’oratoire de Marie de Médicis, et le fait expirer, deux siècles après, tourmenté et grimaçant, dans le boudoir de la Dubarry. » [14]

Cormeray était la plus petite paroisse du diocèse d’Avranches : elle comptait 12 feux ; le Grippon en avait 14. En 1648, cette église, qui avait pour patron le seigneur du lieu, rendait 300 liv. [15] : elle était dédiée à Saint-Martin.

A peu de distance, dans un enclos muré qu’on appelle Liber, était un prêche, démoli en 1685 par un de La Champagne, lieutenant au bailliage, en vertu des ordres du roi. Les matériaux furent adjugés aux frères de la Charité de Pontorson. Ce prêche était une ancienne maladrerie, mentionnée dans le Pouillé de 1648 : « La maladrerie de Cormeray, de fondation commune, qui a pour patron l’évêque, rend 35 liv. »

Le nom primitif, celui qui est resté dans la prononciation locale, était Cromeray : c’est la forme qu’il a dans la charte de 917 : Dimidiutn Cromerci. Nous le trouvons ainsi dans sa latinisation générale, et en particulier dans un registre des Synodes : S. M. de Cromereyo. Cromer est sans doute le nom de celui qui posséda et dénomma cette localité dans la grande division du sol normand que fit Rollon à ses fidèles : « Terram funiculo suis fidelibus divisit. »

A Cormeray est né le général Legendre. Soldat au régiment de Forez, prêtre, puis soldat, quand la Révolution éclata, il parvint au grade de général de brigade. Il ternit ses services par la part qu’il prit à la capitulation de Baylen. Il fut secrétaire de celui qui signa cette capitulation, du général Dupont, quand la Restauration en eut fait un ministre de la guerre.

Source :

Notes

[1] NDLR : ancienne commune de la Manche

[2] On la voit de Mortain ; il y a auprès un télégraphe. Un village de Macey s’appelle l’Ardiller : le paysan de l’Avranchin appelle ainsi le lieu d’où l’on extrait de l’ardille ou argile. Ce nom, celui de fief de la Poterie et de fief au Potier donnent lieu de croire que Macey a été autrefois un lieu de fabrication de vases d’argile. D’après les recherches de M. Marchal, ingénieur, l’argile de Macey remplit généralement les conditions de la terre céramique.

[3] D. Huynes.

[4] N° 14, 342.

[5] Toutefois il y a en Normandie d’autres Macey, des Macieu, Machy, Massay, Massaye, Massiac. En fait d’étymologie du Moyen-Age, on ne doit pas oublier que l’orthographe n’est rien, et que la prononciation est tout : c’est le contraire pour les langues savantes de la Grèce et de Rome. Pour le Moyen-Age, la prononciation est la raison des mots ; pour l’antiquité, c’est l’orthographe.

[6] Voir Huynes. N° 80-94.

[7] M. Cousin.

[8] Voir Argouges.

[9] Un mois après, un Pontavice, de Saint-Laurent-de-Terregatte, fut tué d’un coup d’épée par le baron de Canisy, gouverneur d’Avranches. On voit que les lois sévères de Richelieu contre le duel avaient leur raison.

[10] M. Foucault. La taille était alors de 520 liv.

[11] N° 34. Id. D. Le Roy et D. Huynes. Remarquons ici qu’on devrait dire Pierre du Roy, son nom étant latinisé en Petrus Regis.

[12] En tête des Observations.

[13] Victor Hugo, Le Rhin.

[14] Id. Notre-Dame de Paris.

[15] Les seigneurs furent long-temps les de Verdun.