Le50enligneBIS
> Paroisses (Manche) > abc > Les Cresnays > Histoire > Les Cresnays - Notes historiques et archéologiques

Les Cresnays - Notes historiques et archéologiques


NDLR : texte de 1845, voir source en bas de page.


Une grande vallée sinueuse, celle de la Sée, et quatre vallons parallèles affluant à ce bassin, enfermés dans un carré, tel est le dessin de la commune des Cresnays. [1] Elle est limitée au nord par la Sée, à l’est par le ruisseau de Bellefontaine, à l’ouest par celui de la Goupillière, elle est déterminée au nord par un petit cours d’eau et une ligne idéale.

Les Cresnays Fanum Sti Petri de Creneio et Fanum Stae Mariae de Creneio, ou, selon le Registre des Synodes de 1596, de Cresneyo. [2] Cette orthographe est sans doute l’altération de la forme générale en ey ou en é, Cresney, Cresné, Creneium, habitation de Crenne. Nous retrouvons ce nom accolé à une branche des Verdun. Dans une charte du XIIe siècle, du chartrier de Mortain, citée par M. Desroches, on trouve Cresnay : « Gervasius de Cresnay presbiter salutem. » Ce nom se retrouve dans le fief de la Crenne. Il y a dans le Domesday des noms analogues qui autorisent à reconnaître un nom propre normand dans le nom de ces paroisses. On y trouve un Radulfus de Creneburn, Tenant-en-chef, et une église de ce nom, Ecclesia Creneburnensis. Il y avait un Grene dans le comté de Suffolk.

Sous le nom de les Cresnays sont comprises deux paroisses, Saint-Pierre-de-Cresnay et Notre-Dame-de-Cresnay, dont les églises n’étaient séparées que par quelques mètres. L’église de Notre-Dame a été détruite et ses débris ont servi à l’agrandissement de celle de Saint-Pierre. Son cimetière, affecté à la paroisse survivante, est resté pour attester son emplacement. On y voit encore sa croix de pierre, son vieil if qui attesterait sa haute antiquité, une cuve baptismale octogone, une pierre tombale portée sur quatre colonnettes avec cette inscription : Cy gît maître François Besnou, curé de ce lieu, 1759. En 1648, l’église de Notre-Dame-du-Cresnay, dont le patron était le seigneur du lieu, rendait 400 liv. [3]

Une église a dû exister très-anciennement là où s’élève l’église actuelle de Saint-Pierre-de-Cresnay, comme l’attestent sa jolie croix ronde extérieure et son if dont le tronc a plus de six mètres de circonférence. L’église d’aujourd’hui est généralement neuve, elle a deux transepts et porte une petite flèche en essentes à son portail. Le chœur qui est pentagonal porte sur sa corniche extérieure cette inscription : Julien 1741. Sur la fenêtre du transept nord on lit : Sta Anna, ora pro nobis. Toutes les baies sont carrées ou en anse de panier. Sur la cuve baptismale on lit : C. C. dedit 1786. On trouve là la statue d’une sainte rare, honorée aussi à Saint-Pierre-du-Tronchet, sainte Venice, une petite crèche flamboyante, de vieilles statues de sainte Catherine et de saint Denis. Il y a six pierres tombales dont une de 1659, un devant d’autel où sont peints de beaux raisins et de beaux épis, symbole de l’Eucharistie. En 1648, l’église de Saint-Pierre-du-Cresnay, qui avait pour patron le seigneur du lieu, rendait un revenu de 500 liv. [4]

Le logis des Cresnays est une maison basse et sans architecture, ayant toutefois sa douve féodale. Un assez joli cintre, qui se trouve dans la cour, vaut mieux aux yeux de l’antiquaire que toute l’habitation. L’école communale se dresse avec plus de grandeur que le logis seigneurial.

Il y a peut-être eu une habitation féodale à l’endroit que Cassini appelle le Manoir, les gens du lieu le Menet, et M. Bitouzé le Haut-Manoir.

Le terrain où est assise l’église est généralement plat et humide. On y arrive d’un côté par une belle et longue chasse. Une rivière coule à peu de distance, affluent de la Sée qui limite la commune au nord.

L’ancien presbytère est une maison âgée de quelques siècles.

Le paysage de cette localité a cela de particulier que les sapins sont fréquemment mêlés aux arbres indigènes. Les cintres se voient dans toutes les fermes.

A la fin du XIIe siècle, à l’époque où s’élevait l’abbaye de Montmorel, un prêtre de Saint-Pierre-de-Cresnay voulut apporter son offrande à l’abbaye naissante. Voici les termes de sa charte que nous trouvons dans M. Desroches : « A tous les fidèles du Christ qui liront la présente charte, Gervais de Cresnay, prêtre, salut au Seigneur : que votre université sache que pour le salut de mon âme et celui de mes prédécesseurs j’ai donné en pure et perpétuelle aumône à Dieu et à l’abbaye de Notre-Dame de Montmorel, et aux chanoines qui y servent Dieu, un quartier de froment assis en la terre de la Rabeudière, en la paroisse de Saint-Pierre-de-Cresnay, pour être tenu librement et paisiblement par lesdits chanoines. » [5]

Au temps de la Recherche de Monfaut, au XVe siècle, fut trouvé noble Bertrand de La Roque à Saint-Pierre-de-Cresnay.

Les paroisses de Notre-Dame et de Saint-Pierre-de-Cresnay étaient, au milieu du XVIe siècle, des vavassoreries dépendantes de l’évêque d’Avranches. Dans son Aveu rendu en 1535 à François 1er, Robert Cenalis énumère les feudataires de l’évêché : «  Bertrand du Parc, représentant le droit de Jean Avenel, tient les vavassoreries de Notre-Dame et Saint-Pierre-de-Cresnai. » [6]

Bertrand de Foissi, sieur de Cresnay, fut tué à la bataille d’Ivry. [7]

En 1698, Saint-Pierre-des-Cresnays avait une cure qui valait 400 liv., un prêtre, une taille de 756 liv., et 128 taillables. Notre-Dame-de-Crenets avait une cure de 400 liv., payait 630 liv. de taille, et renfermait 126 taillables. [8]

Une branche de l’illustre famille des d’Auray était à Cresnay. [9]

En 1698, les personnes nobles en Saint-Pierre-de-Cresnay étaient Gilles et Pierre Le Maignen, et en Notre-Dame-de-Cresnay G. Poilvilain, seigneur du lieu, Jean d’Auray et la veuve d’Auray. [10]

La marquise de Crequy dit, dans son Nobiliaire, que les titres des Poilvilain de Cresnay étaient antérieurs à 1399. [11]

Dans le siècle dernier, un Poilvilain, comte de Cresnai, fut vice-amiral de France ; on lit dans les Mss. du docteur Cousin : « Charles de Poilvillain, comte de Cresnai, vice-amiral de France dans les mers du Ponent, et grand-croix de l’ordre de Saint-Louis, mourut le 31 mai 1756 ; il était entré dans la marine en 1705 et s’était distingué dans les différens grades de ce service. » Le dernier des Cresnay est un colonel de l’Empire, qui a laissé un bras sur le champ de bataille.

A l’époque de 1789, alors que tous les ordres de l’état saluaient l’aurore d’une régénération sociale, notre pays vit deux exemples que l’on peut prendre comme le symbole de l’adhésion du clergé et de la noblesse à l’élan général des idées : les religieux du Mont Saint-Michel, par une décision canonique, offraient à la patrie les richesses sacrées de leur trésor, et faisaient don au conseil national d’Avranches de 158 marcs d’argent, de vermeil et de pierres précieuses. Le marquis de Cresnay offrait à la garde nationale d’Avranches deux canons déposés dans la cour de son château. [12]

Dans cette commune se trouvent les deux fiefs, la Basse-Garlière et la Haute-Garlière : ils rappellent le séminaire de la Garlière situé à une très-petite distance, dans la commune de Saint-Laurent-de-Cuves. Quand la Salle synodale de l’évêché d’Avranches se fut écroulée sous les boulets du duc de Montpensier, et que le chef des Ligueurs, Oudard Péricard, frère de l’évêque François Péricard, fut mort sur la brèche, les Synodes furent tenus quelquefois à Saint-Laurent-de-Cuves, dans le séminaire de la Garlière. Nous possédons un registre des Synodes pour les années 1596, 97, 98, dans lequel on lit : « 1796, Synodus hiemalis quae tenta fuit Abrincis in aula decanali propter ruinam aulae Episcopatus. — 1798, Synodus hiemalis tenta fuit Cuppis per dominum Fortin, vicarium generalem. » [13] [14] Daniel Huet réunit la maison de la Garlière au séminaire d’Avranches, dirigé par les Eudistes. Ce fut alors dans cette maison que se fit la retraite annuelle des Bonnes-Sœurs, ou institutrices carmélites.

Source :

Notes

[1] NDLR : La commune des Cresnays est constituée en 1825 par la fusion de Notre-Dame-de-Cresnay et Saint-Pierre-de-Cresnay.

[2] Reg. Mss. de M. Guiton de La Villeberge.

[3] Pouillé, p. 9

[4] Pouillé, p. 9

[5] Hist. du Mont Saint-Michel, tom. 1er, chap. XII.

[6] Mss. de M. Cousin, tom. V.

[7] M. Desroches, Hist. du Mont Saint-Michel, deux. vol., chap. XVI.

[8] Mém. sur la Gén. de Caen.

[9] Recherches sur le Domesday, par MM. d’Anisy et de Sainte-Marie, tom. 1er.

[10] Mém. sur la Gén. de Caen.

[11] Souvenirs de la marquise de Crequy, tom. X. Elle les cite dans les familles dont on ne pouvait se procurer les dates originelles, mais qui étaient antérieures à 1599. Elle cite dans la même catégorie les de Pracontald ou Pracontal (chevalier) 1335, les Williamson ou d’Oillamson (knight) 1368. Voir les Villiamson aux Chéris.

[12] M. Fulgence Girard, Annuaire, p. 258.

[13] Plus probablement à Cuves cependant. Voir cet article.

[14] NDLR : Bien 1796 et 1798 dans le texte "original" ; 1596 et 1598 semblent plus probables.