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Saint-Jean-des-Champs - Notes historiques et archéologiques


NDLR : Texte de 1847 ; voir source en bas de page.


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a commune considérable de Saint-Jean-des-Champs est excessivement irrégulière : elle a généralement la forme d’un T, dont le pied serait évasé. Une projection de Saint-Sauveur-la-Pommeraye l’entaille profondément à l’est, et la divise comme en deux parties. C’est un sol assez tourmenté, sillonné de beaucoup de ruisseaux. Cet état du terrain se révèle dans les noms de l’Eau-Hamel, village Bouillon, et la Bouillonnière, les Vaux, la Vallée-Ruelle, Pont-Roger, Pont-d’Aze, la Planche.

En fait de monumens, il y a dans cette commune l’église et le château de Pont-Roger.

L’église porte l’empreinte de plusieurs époques. La croix ronde du cimetière et un pan d’opus spicatum attestent le XIIe ou le XIIIe siècle. La base de la tour et les nervures rondes de sa voûte, sortant du mur comme une tige vigoureuse, [1] sont probablement du XIVe. Le XVe est représenté par une fenêtre du midi et par les élégans fonts baptismaux, avec leur base ronde élevée, portant une cuve brodée d’arabesques avec des anges aux ailes éployées sur les quatre faces. Il y a eu une inscription, mais les caractères ont été mutilés. Ce joli baptistère ressemble à celui de Saint-Léger. Le XVIIIe siècle réclame le porche, quelque peu grec du midi, la plupart des fenêtres, et quelques sculptures assez jolies, les panneaux en zigzags de la porte méridionale, les stalles, le pupitre sur lequel un ange est aux prises avec des serpens. Il y a peu de dalles tumulaires. Une d’elles recouvre le corps d’un du Chesne de La Conterie.

Notre épigraphe indique le patronage et les revenus de cette église au XIIe siècle. Au XIVe, il y avait eu peu de changemens : « Abbas S. Michaelis est patronus ecclesie S. J. de Campis. Taxata est ad quinquaginta libras. Dictus abbas percipit duas garbas decime bladorum. Rector percipit terciam garbam et omnia alia que possunt altalagio pertinere. Rector non habet elemosinam. Dictus abbas consuevit percipere super altalagio quatuor libras tur. Rector solvit octo solidos pro capa Episcopi. » [2] En 1648, cette église rendait 800 liv.

Le patronage de cette église avait été donné au Mont-Saint-Michel avant la confection du Livre noir, c’est-à-dire au moins avant les vingt dernières années du XIIe siècle. Gilbert Bacon et sa femme lui firent cette aumône. [3] Mention du titre de cette donation est faite dans l’Inventaire des titres du monastère : « Carta Gilberti Baconis et ejus uxoris de ecclesia de S.J. de Campis, quod nobis renunciavit jus patronatus. » [4] En 1219, il y eut une reconnaissance formelle de ce patronage : « An. 1219, die S. Clementis in assisia Const. recognita est jus nostrum in possessione et proprietate ecclesie S. J. de Campis. » [5] Le Neustria cite le même fait sous le gouvernement de Th. des Chambres : « An. 1219, discussio facta est super proprietatem patronatus S. J. de Campis. » [6]

Au bord d’un vaucel et d’un vaste étang couvert de potamois, à la lisière d’un bois, est le manoir de Saint-Jean-des-Champs, ou château de Pont-Roger. C’est une habitation du siècle dernier, dont la demi-lune et la porte d’honneur ne manquent pas de grandeur, qui s’est élevée sur l’emplacement de la motte du manoir de Saint-Jean-des-Champs, d’où les Lamotte de Pont-Roger ont tiré leur nom. Cette famille distinguée donna un défenseur au Mont dans le grand siège du XVe siècle ; il y était avec un de Bricqueville dont un des descendans, le brave colonel Armand de Bricqueville, a été le dernier propriétaire du château de Pont-Roger. La Motte de Pont-Roger portait d’argent au sanglier de sable. Il y avait encore deux La Motte avec les mêmes armes. Nous trouvons deux mentions de ce manoir dans l’Inventaire des chartes du Mont Saint-Michel : « Donatio magistri Petri de manerio S. Joh. de Campis. » — « Donatio Petri Toustain de manerio S. J. de Campis. » [7] Le Mont avait au XIVe siècle en cette paroisse un vavasseur, G. de La Table. Rien ne rappelle l’ancien manoir qu’un vieux colombier.

Les titres du Mont et de la Luzerne mentionnent souvent des localités de Saint-Jean-des-Champs. Une charte de la Luzerne cite le lieu dit les Croix, Cruces : « H. de Poterello concessit totum tenementum quod Emma Textricis tenebat de Rob. Marcadi in parrochia S. J. de Campis, situm juxta Cruces ejusdem parrochie. » Une autre cite une terre de Saint-Jean : « Inter la Patiniere et Lescluse molendini Quenart... butat ad queminum qui ducit Dorepast ad mare et ad campum de Franxino. » Une autre relate une aumône de blé dans cette paroisse, dans le champ « de mara as wandons. » W. de La Mouche donna à la Luzerne une dîme « In portione sui feodi de Pumont in parrochia S. J. de Campis. » [8]

A la fin du XVe siècle, Geoffroi Herbert, évêque de Coutances, acheta, en Saint-Jean-des-Champs, la terre du Bosc-des-Préaux. [9] Le Mont Saint-Michel acquit des droits sur ce bois quelques années plus tard, ou peut-être en acquit la propriété. Voici les expressions de D. Huynes : « Jean de Lamps acquit pour ce monastère le fief et sergenterie du Bois-des-Preaux en Saint-Jean-des-Champs, » et celles de son abréviateur, D. Le Roy : « 1519. Acquisition du fief et sergenterie du Bois-des-Preaux en Saint-Jean-des-Champs, par le Mont. » [10] Cette abbaye avait beaucoup de droits et de biens en cette paroisse. L’Inventaire des chartes nous a conservé plusieurs titres relatifs à ces droits, titres qui font vivement regretter les pièces entières :

« Carta G. Sauve de prochia S. J. de Campis super quod attornatur in masura Pucelle. — Littera abbatis de Lucerna de decima de Pumont. — Littera presentationis ecclesie S. J. de Campis. — Littera Rad. de Brehal de ecclesia S. J..... — Carta Auberti Trace super hiis que nobis dedit in prochia S. J. de Campis. » [11]

L’abbaye de la Luzerne avait aussi quelques biens dans Saint-Jean : la mention s’en trouvera dans l’histoire de ce monastère. [12]

Source :

Notes

[1] Cette nervure, qui sort du mur, avec un tore ou une espèce d’expansion à sa naissance, ressemble assez à une tige avec le collet de la racine. Cette forme se voit en plusieurs endroits de la cathédrale de Coutances : c’est sans doute de là qu’elle s’est répandue dans plusieurs églises rurales du diocèse.

[2] Livre Blanc, fol. 28 r°.

[3] Ric. Seguin, Histoire arch. des Bocains, p. 196.

[4] Mss. n° 34. Les Bacon, très-illustres en Angleterre, donnèrent un défenseur au Mont Saint-Michel au XVe siècle, P. Bacon.

[5] Cart., fol. 124. Entre autres témoins était Vimond Hospitatorem de Repasto, dont nous avons parlé à l’art. du Repas.

[6] Abbatia Montis.

[7] Mss. n° 34.

[8] Charte de 1272. Quelques articles des Rôles de l’Échiquier, que nous avons omis, se rapportent à des localités voisines de Saint-Jean

[9] M. Le Canu, Hist. des Evêques de Coutances.

[10] Hist. de la célèbre Abbaye, par D. Huynes. Le Livre des merveilleuses Recherches, de D. Le Roy.

[11] Mss. n° 34, de honore S. Paterni.

[12] V. la Luzerne.