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Saint-Georges-de-Livoye - Notes historiques et archéologiques


NDLR : texte de 1845, voir source en bas de page.


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ne voie romaine passait, selon beaucoup de probabilités, sur la ligne des deux communes de Livoye, et c’est de là qu’elles ont tiré leur nom commun, en associant un souvenir chrétien à un souvenir du paganisme. Une pareille association se rencontre dans le double nom d’un bois voisin, dont une partie s’appelle le Bois-de-Saint-Nicolas et l’autre le Bois-de-César. Si une église romane a existé là où s’élève l’église de Saint-Georges, il n’en reste plus de vestiges positifs. Cependant les deux contreforts appliqués, que l’on a surmontés plus récemment d’un cintre, et qui forment une espèce de pylône ou vestibule appliqué, offrent quelque chose de l’appareillage roman. La disposition générale de l’église est celle de la croix grecque, dont les bras débordent peu sur le tronc. Chœur, nef et transepts sont du XVIIIe siècle. La tour est de 1657. Sur le portail on lit : George Vaugrente P. C. D. Livoye 1643. Cette inscription nous apprend sans doute le nom de celui qui fit faire le portail appliqué, cintre en anse de panier, posé sur deux contreforts d’un aspect roman, surmonté d’un triangle avec croisette. L’église de Saint-Georges conserve de beaux restes de vitraux encastillés dans deux fenêtres du XVIIIe siècle. Un des panneaux conservés, couleur bleu et blanc, représente, sous un beau dais d’architecture flamboyante à pendentifs flanqué de deux pinacles, saint Georges montant un cheval d’un beau mouvement d’effroi, foulant aux pieds le dragon.
L’encadrement du vitrail est formé de couronnes jaunes d’une verrerie plus jeune, du XVIe siècle, avec l’inscription R. p J., indiquant peut-être le nom du donateur. Le vitrail correspondant est de la même époque et présente le même dais et les mêmes clochetons. Sous le dais est un Christ crucifié, et au pied de la croix la vierge et saint Jean. Les extrémités inférieures ont été retranchées. A l’intérieur, au-dessus du portail est un groupe en pierre, grossier et naïf, de saint Georges terrassant le dragon. Le saint est en costume Moyen-Age, visière levée, raide sur les étriers, tenant le bouclier de la main droite, et de la gauche enfonçant sa lance dans la gueule du dragon aux larges ailes éployées. Le cheval marche paisiblement, et comme sans s’en apercevoir, sur le ventre du monstre. Une pensée naïve respire dans tout le groupe. L’artiste semble avoir voulu marquer la sûreté et la facilité de la victoire, et montrer que la lutte n’était qu’un jeu pour un si grand saint. Il a le visage riant, la visière relevée, il tient son bouclier de la main droite, de la gauche il frappe dédaigneusement la bête, et son cheval n’est pas même ému. Il y a moins d’art, mais plus de signification morale dans ce groupe que dans le vitrail. Le maître-autel est un des plus barbares et des plus ridicules qu’on puisse imaginer : il y a un saint Georges peinturluré qui ressemble à une idole mexicaine, et qui contraste avec le vitrail et le groupe d’une manière bien triste pour notre temps. Un Père Éternel, couché nonchalamment sur des nuages, avec son air narquois et bonhomme, servirait bien de vignette à la chanson de Béranger. On voit encore quatre mauvais plâtres modernes. Il y a quelques jolies statuettes antiques. A un des autels latéraux est une jolie vierge fleuronnée et dorée, posée sur un socle sculpté : la face antérieure de ce socle représente l’enfant dans la crèche, au-dessous est une horrible tête moderne qui ressemble à une face de Gorgone. Le portail intérieur est une ogive élevée avec des colonnes arrondies à demi-engagées, à chapiteau carré avec quelques moulures. Le baptistère est une cuve polygonale, sur une base ronde courte. Il n’y a que deux pierres tombales : elles sont peu anciennes. La croix du cimetière est d’une élévation exagérée et désagréable au regard : elle date de 1682.

La cure de Saint-Georges était à la présentation du chapitre de Cléri, et d’après le Pouillé du Diocèse, 1648, elle rendait 600 liv. [1]

En 1698, à Saint-Georges-de-Livoye la cure valait 800 liv. : outre le curé il y avait quatre prêtres ; la taille était de 1,204 liv. et le nombre des taillables était de 124. Les nobles étaient P. et T. Designy. [2]

En 1764, cette paroisse, qui appartenait à la sergenterie du Val-de-Sée, renfermait 68 feux. [3]

Il y avait en cette commune une habitation appelée le Manoir-de-Saint-Georges. [4] Il y a aussi un Mesnil.

Quand il s’agit des grandes voies romaines, on peut se prononcer avec quelque assurance, surtout quand on en trouve les distances dans les sources authentiques ; [5] mais quand il faut retrouver la direction des voies secondaires, la timidité, le doute, l’hypothèse sont une nécessité, surtout si, dans l’absence d’une stratification, on n’a d’autres autorités et d’autres jalons que des noms topographiques ou des tronçons, à la vérité antiques, mais d’une haute antiquité contestable. La voie d’Avranches à Vire se trouve dans cette dernière classe : elle n’est tracée ni signalée dans aucune autorité, elle n’est que secondaire, et ne peut se retrouver qu’à l’aide de noms locaux et de quelques tronçons. Ce que nous en dirons doit être considéré comme une hypothèse sur une question non traitée jusqu’à maintenant, et sinon comme une source, du moins comme une indication pour ceux qui s’occuperaient plus tard spécialement de la voirie romaine dans l’Avranchin.

La voie romaine d’Avranches à Vire partait à l’est de cette première ville par cette rue antique que des traditions appellent la Rue de la Déesse, aujourd’hui Cour de Paradis ; [6] elle passait le ruisseau de Pivette à Bouillant où l’on a trouvé des débris qui permettent d’y placer un édicule, et une grande quantité de coins en bronze : la route romaine devait être très-souvent la route gauloise. Laissant à l’est le promontoire sur lequel s’élève l’église de Saint-Sénier, elle passait en cette commune dans la direction de la Pilière, expression qui rappelle un menhir ou jalon de voie celtique. Se dirigeant vers la localité appelée du nom caractéristique du Perron, [7] elle longeait la Sée, passait par la Perrière en la Gohannière, et franchissait la rivière par un gué sous l’église de Tirepied, [8] dont la terminaison indique un passage de voie romaine. [9] Ensuite passant au pied de la forteresse du Val-de-Sée, qui a pu être une station romaine, et sous le camp du Châtellier, elle courait parallèlement à la rivière, à mi-côte, selon la ligne actuelle, où les expressions de la Rue, de la Ferrée signalent son passage. A la hauteur de Vernix, elle s’éloignait de la Sée, dans une déviation septentrionale, et entrait sur le territoire qui a si bien gardé son nom, Saint-Georges-de-la-Voie, Notre-Dame-de-la-Voie ; elle passait sur la lisière du Bois-de-César, en Saint-Nicolas-des-Bois, au pied du Mont-Jouy, et dans ce canton elle existe encore, route profonde, ravin creusé de plus de trois mètres ; c’est aujourd’hui le raccourci de Vernis à Saint-Laurent et à Saint-Poix. On remarque même une stratification très-ancienne à sa sortie de la première commune. Nous la conduisons jusqu’à l’endroit si significatif de Montjoye, où elle sort de l’Avranchin, et où nous cessons de la suivre.

Source :

Notes

[1] Pouillé, p. 6.

[2] Mém. sur la Gén. de Caen.

[3] Expilly, Dict. des Gaules.

[4] Marqué dans Cassini.

[5] César, la carie de Peutinger, l’Itinéraire d’Antonin, la Notice des Dignités de l’Empire.

[6] Voir l’art. d’Avranches et celui de Saint-Sénier.

[7] Lieu empierré. Voir l’article de la Chaise-Baudouin.

[8] On a trouvé des monnaies romaines en Tirepied, et la découverte a été signalée par M. de Gerville dans les Mémoires des Antiquaires de Normandie.

[9] M. de Gerville reconnaît cette signification générale aux mots ainsi terminés, et l’applique à Taillepied.