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Marigny - Ancien château


NDLR : Texte de 1830 : Voir source en fin d’article


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a grande commune de Marigny, chef-lieu du canton qui porte son nom, le fut autrefois d’une baronnie qui donnait droit de séance à l’Echiquier de Normandie parmi les barons du Cotentin.

Elle offre au faiseur de recherches un emplacement de château très-remarquable et des plus considérables du département. Cependant je ne vois pas un seigneur du nom de Marigny à la Conquête de l’Angleterre ; je présume que celui qui possédait alors cette baronnie figura sous un autre nom à cette expédition mémorable.

Les plus anciens seigneurs de Marigny, dont j’aie eu connaissance, appartiennent à une des principales familles normandes établies en Angleterre dès le temps de la conquête : c’est celle de Say (ou Sey), qui tirait son nom d’une commune dans l’arrondissement d’Argentan.

Dans l’onzième volume de la Gallia Christiana, je trouve une chartre de 1060 où figure Picot de Say avec Robert et Henri ses fils ; [1] ils font à Saint-Martin-de-Séez des donations dans la paroisse de Say.

Dans le siècle suivant, Jourdain, seigneur de Say, et Luce sa femme, fondèrent l’abbaye d’Aunay. [2] Gilbert, fils de Jourdain, confirma, en 1151, les donations faites par son père à cette abbaye. Il y en ajouta de nouvelles ; il data sa chartre de son château de Marigny et mourut peu après, sans avoir été marié.

De trois enfants de Jourdain il ne restait plus qu’une fille nommée Agnès : elle épousa Richard du Hommet, connétable de Normandie, et lui apporta en mariage tous les biens du fondateur. Parmi les donations qu’ils y ajoutèrent, on voit Marigny avec le bourg.

Son mari, elle et leurs trois fils Guillaume, Enguerrand et Jourdain, confirmèrent de nouveau les donations du fondateur. Parmi les donations qu’ils y ajoutèrent, on voit Marigny avec le bourg.

Nous avons établi que Marigny fut d’abord à la famille de Say, puis à celle du Hommet ; il nous reste à prouver que ce ne peut être Marigny dans un autre diocèse : cela est aisé au moyen du Livre noir de l’évêché. Voici ce que j’y trouve : Ecclesia de Marigneio patronus abbas de Alneto.

La seigneurie de Remilly, unie à celle de Marigny dès le temps des premiers du Hommet, après Jourdain et Gilbert de Say, formait ainsi réunie une demi baronnie, et devait au roi Philippe-Auguste le service de deux chevaliers et demi. [3] Ce service se faisait par Enguerrand du Hommet, pour le connétable, son frère aîné.

Après les du Hommet, le premier baron de Marigny et de Remilly que je trouve est le sire Guillaume de Courcy. Sous le règne de Philippe-le-Hardi il épousa Anne, héritière de ces deux seigneuries, qu’elle lui apporta en mariage. [4]

Tiphaine de Courcy, héritière de ces deux seigneuries dans le XIVe siècle, les porta en mariage à Gilbert de Malesmains, [5] dont nous avons parlé, en faisant l’énumération des châteaux de l’arrondissement d’Avranches, à l’article Sacey. [6]

Jeanne, fille et héritière de Gilbert, épousa Olivier de Montauban, seigneur breton, qui mourut en 1388. [7] Les descendants, seigneurs de Marigny et Remilly, furent grands baillis du Cotentin.

Henri V, roi d’Angleterre, devenu maître de la Normandie vers 1418, confisqua la seigneurie de Marigny et la donna à un seigneur de Thiboutot qui avait suivi son parti ; mais en 1450, Jean sire de Montauban, maréchal de Bretagne, en fut remis en possession et fut nommé grand bailly du Cotentin à la place de son père. [8] En 1451, il rendit aveu au Roi des terres de Marigny et de Remilly. En 1465, il obtint droit de haute justice pour ses terres de Normandie. Il mourut à Tours en mars 1466. Sa fille unique, héritière de ses biens, les porta en mariage dans la famille de Rohan Guémené. [9]

Quand M. Foucault, intendant de Caen, à la fin du XVIIe siècle et au commencement du XVIIIe, donna l’état de sa généralité, le seigneur de Marigny était un Rohan-Guémené. M. de Guer, autre seigneur breton, possédait le marquisat de Marigny au commencement de la révolution.

D’après un aveu de la seigneurie de Marigny, rendu au Roi en 1408, on voit que c’était alors une demi-baronnie dont dépendait Gratot qui était un fief de chevalier.

Antérieurement à cette époque, il y avait à Marigny un château avec douves et fossés et un vivier à refoul. Le seigneur était patron de la chapelle de Remilly dont il avait l’administration. Le seigneur de Camprond était obligé de passer une nuit à la porte du château, dans la rue du Nord, avec trois flèches ferrées.

Marigny avait été démembré de la baronnie de Say à Quettreville, qui s’étendait aux paroisses de Cérences, Cenilly, Guéhébert, la Haie-Contesse, Hauteville-la-Guichard, Marigny, Le Lorey, le Mesnil-Vigot ; l’autre moitié à Remilly, Saint-Ebremond, Saint-Louet-sur-Lozon, Saint-Nicolas de Coutances.

Le seigneur de Marigny possédait à Hauteville-la-Guichard une futaie de quatre-vingt arpents, close en partie de murs, et un château que M. de Guer avait remplacé par une très-belle habitation moderne vendue durant la révolution, et détruite avant d’avoir été terminée.

En sortant du bourg de Marigny pour aller à la grande route de Coutances à Saint-Lô, on voit vers le midi la grande Motte de l’ancien château fort. Cette élévation factice, nommée encore Butte du Castel, est escarpée, quoique peu élevée. Elle était en grande partie défendue par les eaux du vivier qu’on y faisait refluer à volonté. Je n’y ai reconnu aucunes traces de maçonnerie.

La famille de Say a été illustre en Angleterre dans les temps rapprochés de la conquête. Son nom y subsiste encore sur la liste des lords. Banks la fait remonter à Picot de Say qui vivait sous le règne du Conquérant. Elle portait autrefois écartelé d’or et de gueules. [10]

Je ne donne pas les armes des autres seigneurs de Marigny. Elles se trouvent presque toutes gravées dans l’histoire des grands Officiers de la couronne. Nous verrons bientôt celles des barons du Hommet.

Source :

Notes

[1] Gall. Christ, XI, instrum. eccles. Sagiensis, col. 152.

[2] Gall. Christ. XI, col. 443.

[3] Lib. feodor. Philip. reg. Aug. penes nos, p. 3.

[4] La Chenaye des Bois, Diction. verbo Courcy.

[5] Laroq., maison d’Harc., p. 1311.

[6] Voir le tome précéd., p. 132-133.

[7] Grands offic. de la couron., tom. VII, p. 856-857.

[8] Hist. manusc. des grands baillis du Cotentin. — Grands offic. de la couronne, tom. VII, p. 857.

[9] Grands offic. de la couronne, t. IV, p. 78 à 80.

[10] Banks extinct baronage, tom. II, p. 461 et seqq.