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Annales des Cauchois, depuis les temps celtiques jusqu’à 1830, par Ch. Juste Houël

Avant-propos


NDLR : texte de 1847, voir source en bas de page.


Une contrée pittoresque, riche, remarquable par la beauté de ses habitants, admirablement située pour le commerce et la navigation, est aujourd’hui incorporée à la France ; son ancien nom même n’est plus légal ; le moment d’écrire son histoire est arrivé ; nous avons entrepris cette tâche. N’espérant d’abord trouver que des faits sans ensemble, nous pensions qu’il y aurait beaucoup de mérite à les réunir ; ils se sont présentés en si grand nombre, que le tableau a été plus facile à remplir qu’à composer.

Le pays de Caux mérite ses annales, comme la Grèce, comme Venise, comme le Portugal, comme tout autre pays agricole, belliqueux, industrieux, ami des lois. Si nous n’avons pas le bonheur de réunir toutes les qualités que nous exigeons, nous-même, dans l’historien ; si nous n’avons pas le style du Cauchois Vertot, qui désirait l’histoire de sa province et la méditait peut-être, du moins nous avons ramassé des matériaux intéressants, nous avons entrepris le labeur de citer plus de douze cents ouvrages, pour prouver la vérité de nos assertions, la patience de nos recherches.

Ce territoire est borné et environné par la Seine, à partir de Hénouville, près Duclair, jusqu’à la mer ; par l’océan, jusqu’à la rivière d’Eu, ou la Bresle par une ligne sinueuse qui entoure Blangi, Hodans, Le Vieux-Rouen, Beaucamp, Morvilliers, Créquier, Gaille-Fontaine, Gournai, Croisy, et fait le périmètre du Vexin, en conservant dans son enclave La Ferté-en-Bray, Forges, Sommery, Saint-Saëns, Saint-Victor, Limésy, Thibermesnil, Flammanville-L’Esneval, Croix-Mare, Panneville, Bouville, Pavilly, Saint- Pierre de Varengeville, et aboutit à Hénouville, point de départ. Ce pays contenait le Havre, Caudebec, Lillebonne, Duclair, Dieppe, Fécamp, Harfleur, Saint-Valery, Montivilliers, Eu, Neufchâtel, Tréport et Aumale ; il a eu six cents paroisses.

Le territoire sur lequel s’étendaient la ville de Rouen et ses faubourgs, occupe le fond de six collines. Il est situé sur la rive droite et la rive gauche de la Seine ; sa circonférence est de plusieurs myriamètres. Il fut, ainsi que la partie du Vexin dont nous avons tracé le circuit, presque toujours sous la même religion, le même gouvernement, les mêmes lois que le pays de Caux. Les annales de ces deux contrées sont presque indivisibles, c’est-à-dire que l’on ne peut raconter par quelle succession d’événements et par l’influence de quels hommes un pays de plaines est devenu le centre d’une grande industrie, s’est trouvé en relations avec tous les peuples du globe, et se trouve aujourd’hui riche de terres fertilisées, couvert de villes, d’édifices et de manufactures, tout à l’heure traversé par deux chemins de fer, sans parler occasionnellement d’un pays montueux, marécageux, qui est limitrophe, et est devenu une ville de 100,000 âmes, surtout quand cette ville est aujourd’hui le chef-lieu des deux territoires ; mais si l’auteur est forcé de donner accidentellement un peu plus que son titre n’a promis, c’est un reproche assez rare pour qu’il n’évite pas de l’encourir.

On a écrit trente fois l’histoire de la Normandie en général ; une seule fois la description, et non l’histoire du pays de Caux ; quelquefois l’histoire de la ville de Rouen, mais surtout sous le rapport monumental et militaire. J’ai entrepris de retrouver les législateurs, les hommes politiques, les commerçants, les agriculteurs, les artistes, les guerriers. Je marcherai d’année en année, en vérifiant beaucoup de dates ; j’intercalerai, pour compléter mon cadre, la foule d’auteurs dont j’ai donné la liste. Les recueils de lois, de cartulaires, d’ordonnances, ont plus servi jusqu’ici aux auteurs de droit et aux jurisconsultes qu’aux historiens ; et pourtant, soit qu’elles protègent, soit qu’elles punissent, les dispositions législatives sont et le plus ferme appui de la chronologie, et la plus exacte peinture des mœurs du temps : ce sont les lois que nous consulterons en premier ordre. Quel parti ne doit pas tirer un historien de cet ouvrage, dans lequel le savant greffier, ami comme nous du bon et docte Langlois, a épuisé ses veilles ! Qu’il y a, dans les faits qu’il met en lumière, de documents pour montrer les vices ou les vertus de l’époque qu’il a embrassée ! Aussi nous empresserons-nous de puiser aux registres qui ont, une authenticité analogue pour d’autres époques. Les chartriers, les procès-verbaux des Sociétés savantes, et notamment ceux de l’Académie de Rouen, de la Société d’émulation, de la Société des antiquaires de Normandie et de la Société de l’histoire de France, le Journal des savants, les nobiliaires, les registres des confréries, les cueilloirs, les biographies, les collections, les galeries de tableaux même, offrent des faits qu’il faut d’abord reporter à leur date, puis soumettre à la critique, puis mettre en harmonie avec les faits généraux ; enfin, les itinéraires, depuis celui qu’on attribue à Antonin jusqu’à nos savantes cartes de géographie, avec les documents géologiques si consciencieux de M. A. Passy, seront pour ainsi dire les bases d’un pareil travail. Le difficile est de vérifier, puisque peu d’histoires sont plus riches ; de faire la critique de tant de faits ; de sacrifier tant de choses incertaines, de classer, de coordonner, et une fois débarrassé d’entraves, de s’élever par le style jusqu’au titre d’historien. Nous avons cru qu’il nous serait décerné un jour, si nous trouvions une heureuse division de l’ouvrage, si nous nous inspirions de quelques-unes des œuvres citées ; quant à notre indépendance, elle est égale à celle des auteurs les plus recherchés sous ce rapport.

Divisions de l’ouvrage [1]

Les Annales des Cauchois se divisent en six périodes inégales, mais tellement distinctes, que chacune d’elles offre un changement de constitution.

- La première période que nous nommons Celtique comprend les temps les plus reculés, jusques au gouvernement d’Auguste. (Tome I des Annales, page 17)

- La seconde, que nous nommons Romaine, nous conduira jusques à Loth-wig (Clovis) c’est-à-dire l’établissement complet des Franks. (Tome I des Annales, page 87)

- La troisième, ou Neustrienne, nous fera tomber à Hrolf (Rou), ou la création de la Normandie. (Tome I des Annales, page 392 et Tome II, page 1)

- La quatrième, ou Normande, ira jusques à Philippe-Auguste ; en d’autres termes la réunion du duché à la France. (Tome II des Annales, page 187)

- La cinquième, ou période Royale, malgré les intervalles de la domination anglaise, arrivera à 1789. (Tome III des Annales, page 1)

- Et la sixième sera la période Constitutionnelle, phase qui a amené un si profond changement, que l’histoire des Cauchois n’a plus rien de distinct de celle des autres Français. (Tome III des Annales, page 372)

Source :

  • Avant-propos des Annales des Cauchois, depuis les temps celtiques jusqu’à 1830, par Ch. Juste Houël

Notes

[1] NDLR : Ouvrage en trois tomes.