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L’origine des Armoiries de la Ville de Lisieux


Texte de 1873 - source en bas de page


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Lisieux-Blason
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quelle époque la ville de Lisieux eut-elle des Armoiries personnelles ? Nous croyons que ce fut seulement après qu’elle eut été constituée en commune, au XVe siècle ; un des privilèges communaux était, en effet, d’avoir un sceau et de l’apposer sur ses actes.

Avant ce temps-là, la ville était une seigneurie toute Episcopale : le Bailli de l’Evêque la gouvernait judiciairement et administrativement ; il y remplissait les fonctions de Maire, et, probablement, il scellait ses actes du sceau de l’Evêque. Ce sceau était en même temps celui du Chapitre et de l’Exemption de Saint-Cande de Rouen, laquelle faisait partie du diocèse de Lisieux. Tous les Mémoires sur procès, et notamment en 1772, rappelaient ces faits en disant, sans en expliquer les émaux, que le sceau de l’Eglise de Lisieux consistait en deux clefs en sautoir, cantonnés de quatre étoiles, avec une couronne de comte.

Mais de quelle époque dataient-elles ? Nous savons, d’après un sceau de l’Evêque Jourdain du Hommet, du XIIe siècle, que ce prélat y était représenté avec une clef en pal de chaque coté du corps. Sur le sceau des obligations de la vicomté de Lisieux, au XIVe siècle, on voyait deux clefs en sautoir sur une crosse d’Evêque. Les armes du Chapitre, inscrites à la fin du XVIIe siècle, dans l’Armorial général de d’Hozier, p. 291, n° 47, (moyennant 50 l. de finances), étaient d’azur, à deux clefs d’argent passées en sautoir, le haut des clefs d’or, accompagnées de quatre étoiles du même.

Les Armoiries des villes étaient souvent empruntées à l’autorité ou à la Corporation qui y dominait, témoin la nef des mariniers de la ville de Paris, laquelle figurait aussi dans la plupart des Armoiries des corporations de cette ville.

Les premières Armoiries de la commune de Rouen, laquelle datait du XIIe siècle, vers 1150, portaient un lion ou léopard, sans doute pour rappeler qu’elle était la capitale de la Normandie, dont les armes étaient, comme celles de ses Ducs, deux léopards d’Angleterre avec la devise ou cri de guerre Dex aïe (Dieu aide). Mais lorsqu’une révolution communale eut modifié, en 1321, la constitution de la ville, il est probable, dit M. Chéruel, que c’est à cette époque que fut adopté un nouveau symbole en substituant au lion, dans ses Armoiries municipales, un mouton, qui était le sceau dont la Communauté prépondérante des Drapiers de Rouen marquait ses produits. Mais dans le guidon que porte le mouton on conserva le lion comme souvenir ; on se servit, paraît-il, de ce sceau pour la première fois en 1362.

A Lisieux, l’autorité principale étant l’Evêque, il était naturel que ses armes servissent de modèle à celles de la ville.

Cependant nous croyons que c’est à tort que l’auteur d’une histoire de Lisieux (Louis Dubois) a écrit : que la ville de Lisieux n’avait point d’armes, celles de ses Evêques et de l’Eglise (décrites plus haut) avant été accordées (ce qui est inexact) à l’évêque Bazin lorsque la ville se rendit à Charles VII (en 1449).

Ces armes proviendraient-elles de celles de Nicolas Oresme, évêque de Lisieux, de 1377 à 1381, les quelles étaient d’azur à 4 étoiles d’or, deux et deux, en y ajoutant les clefs et le chef de France ? Nous l’ignorons.

Une description des armes de la ville, dont nous allons parler, semblerait indiquer que le chef fleurdelisé y aurait été ajouté vers le XVe ou le XVIe siècle.

Voici l’énoncé d’une pièce en vers trouvée sur la couverture en parchemin d’un registre de l’hôtel-de-ville de Lisieux, commencé en 1477 et fini en 1506.

« Blason des armes de Lisieux, adreçans au Prélat, le seigneur dudit lieu » (probablement à son entrée dans la ville, ainsi qu’on le voit dans plusieurs recueils du temps, et notamment dans les Miscellanea de Halley, de Caen.

   « Chier Pélican, du vergier de déliz,
   Bien tiens à point veoir ton église sainte,
   Plus ne seront nos armes aboliz,
   Quand je te vois, Dieu seul vient à ma plainte,
   Mon pavillon encor aira l’empreinte,
   Sur pan Royal, depuarlé en pourpris,
   Avironné de planètes de prix,
   Car en ce point que gist ce signe pur
   Jadis porté par droit, et porte encor,
   Et porteray dedens le champ d’azur
   Deux Clefs d’argent et quatre estoiles d’or.

   En collaudant le chief des fleurs de lys
   Etc..............
   Vivre pourront, tous mes sujets à seur
   Quand ils orront, pour ma relique encor,
   Prelat portant, dedans le champ d’azur,
   Deux clefs d’argent et quatre estoiles d’or,
   Etc., etc..............
 »

Mais ce qui ne peut laisser de doute sur la différence des armes de la ville et de celles des évêques, ce sont les mentions dans les deux manuscrits suivants :

1° Dans le Gazophilacium Gallicum quarumdam ecclesiarum etc. de Bouhier, p. 34, on lit : « les armes de l’église de Lisieux sont : d’azur, aux clefs d’argent en sautoir et celles de la ville : d’azur, aux mêmes clefs d’argent et quatre étoiles d’or, au chef de France, chargé de trois fleurs de lis d’or. »

2° A la bibliothèque impériale, fonds Saint Germain n° 664, T. A., p. 19, sons le titre : « Armoiries des principales villes de France, on trouve : Armoiries de Lisieux : sur champ d’azur, deux clefs d’argent en sautoir, cantonnées de quatre étoiles d’or, trois fleurs de lis d’argent en chef. »

NOTA : Ces armoiries sont plus logiques que les précédentes et que les suivantes dont nous allons parler, à cause des fleurs de lis d’argent et des étoiles qui ne sont point de sable.

Un décret, du 17 mai 1809, ayant autorisé les villes, communes et corporations, à demander des Armoiries, le Conseil municipal de la ville de Lisieux demanda, par délibération du 12 septembre même année, que celles de Lisieux fussent : « Un mouton reposant sur deux faisceaux de lin vert en graine, emblème de ses manufactures de laine et de toiles. » Mais le Roi, par lettres patentes du 19 avril 1817, confirma à la ville ses anciennes Armoiries en les désignant ainsi qu’il suit : « D’argent, à deux clefs de sable posées en sautoir, cantonnées de quatre étoiles du même, au chef d’azur, chargé de trois fleurs de lis d’or posées en fasce. »

Ce sont celles qui se voient encore actuellement sur la grille en fer de l’Hôtel-de-Ville. Toutefois, rien ne les justifie, et les véritables, selon nous, sont celles indiquées ci-dessus, fonds Saint-Germain, n°664. Partout nous trouvons : sur champ d’azur, et nulle part : sur champ d’argent.

Les Armoiries du corps des Officiers de l’Hôtel-de-Ville de Lisieux étaient : d’azur, aux deux lettres L et L adossées, d’or, accompagnées de trois fleurs de lis du même, deux en chef et une en pointe. (Armorial de d’Hozier, état du 20 septembre 1697, p. 823, n° 193.)

Celles du corps des Officiers de l’Election étaient : d’azur, à trois fleurs de lis d’or, deux et une. (Enregistrées moyennant 50 l. à l’Armorial, p. 823, n° 81.)

Nous ajoutons ici les Armoiries de quelques Communautés civiles et religieuses de la ville et des environs.

L’Abbaye Saint-Désir de Lisieux : de gueules, à deux léopards d’or, l’un au-dessus de l’autre. (Enregistrées, moyennant 50 l. à l’Armorial, p. 291. n° 620.)

Le couvent de la Sainte Trinité (les Mathurins) : d’argent, à une croix pâtée de gueules et d’azur, c’est-à-dire le montant de gueules, et la traverse d’azur, et une bordure d’azur chargée de huit fleurs de lis d’or. (Ibid., p. 676, n° 148.)

Les religieuses Ursulines de Lisieux : d’azur, à un nom de Jésus abrégé, d’or, et enfermé dans un ovale de rayons d’or.

Les frères de la Charité de Thiberville (baronnie de l’Evêque près Lisieux) : de sinople, à un sabre en pal. (Ibid., p. 1298.)

L’écusson du corps des Officiers de la vicomté de Moyaux, près Lisieux, portait : de sable, à un aigle d’or. (Ibid., p. 1076, n° 207.)

Source :
Histoire de l’ancien Evêché-Comté de Lisieux, (Tome I)