un article de Mireille LOULERGUE [1]
Extrait du "Val de Saire au temps du Tue-Vâques" de Michel HAROUY - Editions CHEMINEMENTS
"A bord du petit train du Val de Saire : le TUE VAQUES"
CHERBOURG, devant la station locale cherbourgeoise, la locomotive et son équipe de conduite sont sous pression.
"Les usagers habituels ne consultaient même plus les horaires", confie un vieux normand. "Ils savaient à peu de chose près à quelle heure allait partir le train de Barfleur, mais étaient beaucoup moins sûrs de pouvoir dire celle de leur arrivée !"
6h30 du matin : "la machine qu’on attelle donne une grande secousse ... et tout le monde pêle-mêle tombe assis n’importe où !!" constate avec amertume le poète Alfred ROSSEL dans sa chanson évoquant les tribulations du Tue Vâques
Il poursuit avec malice :"Près de sa femme ou d’une autre, ah ! dame, on se place comme on peut. Dos à dos ou bien côte à côte ou genoux à genoux s’il y a lieu ..."
7h : le mécanicien actionne plusieurs fois le sifflet de sa machine pour faire presser les retardataires ou bien pour éviter les commères bavardant encore sur le quai à monter au plus vide dans les voitures.
Après une halte à l’arrêt de Bagatelle puis en gare des FLAMANDS, le petit train file ou plutôt défile devant un panorame grandiose à la vitesse de 40 km/h
7h27 : dans un crissement de roues, le train s’arrête en gare de BRETEVILLE et repart en se faufilant dans la trouée de la falaise consolidant le CAP MAUPERTUS. La locomotive peine dans la rampe. Elle crache une fumée noire incommodant soi-disant les grincheux, lesquels prétendent qu’il leur serait alors facile de suivre le convoi à pied.
A la halte de MAUPERTUS, le petite train est à peu près au tiers du parcours.
7h42 : FERMANVILLE. Le petit train croise celui descendant vers Cherbourg où s’entassent plusieurs groupes de maraîchers, de pêcheurs et d’éleveurs de la côte Est du Val de Saire qui se rendent fièrement au marché de la sous-préfecture !
A la moitié du parcours, la voie ferrée a dû être établie sur un important remblai permettant le passage surélevé d’une dépression dite de CARNEVILLE, que franchira en son milieu (vallée des MOULINS) un imposant viaduc haut de 31m, long de 250 m, 20 arches. Au passage de chaque train, le voyageur connaissait l’angoisse tout en jouissant d’une vue superbe.
Après avoir traversé une région boisée desservie par la halte champêtre de CARNEVILLE - THEVILLE puis la gare de SAINT PIERRE EGLISE, il est alors 7h58.
Se rapprochant du littoral, la voie dessert les petites stations de VAROUVILLE, RHETOVILLE, NAVILLE, TOCQUEVILLE et RAUVILLE
8h25 GATTEVILLE puis l’avant dernière station de la ligne, QUENANVILLE
8h32 : BARFLEUR. Terminus du TUE VAQUES
Un voyageur parcourant la totalité de la ligne cherbourgeoise exigeant au minimum 1h30 de trajet, déboursait, suivant la classe choisie :
[1] fille d’une ancienne passagère de la ligne et d’un ancien cheminot