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Conquête et domination romaines


un article de Georges-André CHUQUET Georges André CHUQUET


Conquête et domination romaines

_ "C’est peut être le premier grand évènement de notre histoire. L’envahisseur latin entend faire accepter son appui (son autorité) ou l’imposer par la force. Quand les peuples de la région, jusqu’alors indépendants, ont discerné ses intentions, un soulèvement se prépare, fomenté surtout par les Unelli [1] et leur chef Viridovix. En l’absence de César, son lieutenant Q. Titurius Sabinus, alliant la ruse et la tactique, remporte sur les révoltés une victoire décisive, au Mont Castre [2] (près de La Haye du Puits) en 56 avant JC. La résistance éteinte, l’organisation romaine, en "cités" ou en villes entourées de leur territoire, s’installe. Les noms latinisés gardent parfois la marque celtique : Rotomagus (Rouen), Caracotinum (Harfleur) Noviomagus (Lisieux), Juliobona (Lillebonne), Mediolanum (Evreux), Augusto-darum (Bayeux) Crociatonum (Carentan), Grannonum (Portbail ?), Constantia (Coutances) Briovera (Saint Lô), Alauna (Valognes)…

Les voies romaines se multiplient, les monuments s’élèvent. Il subsiste des vestiges d’amphithéâtres, de balnéaires (Lillebone, Valognes) ; des colonnes militaires, des traces d’aqueducs, d’enceintes fortifiées (Sainte Mère Eglise, Ryes, Le Merlerault, Glos, Le Tronquay…). La vie rurale s’organise autour des "villae" grosses exploitation formant localité : nombreux sont les noms en ville. Une industrie local existe, comprenant des forges (des "ferrières"), des verreries ; et les trésors d’argenterie retrouvé, à Bernay, à Berthouville, témoignent d’une existence active, aisée, puissante.

Les habitants ont part à l’administration ; certains jouent un rôle officiel. On conserve à Saint-Lô, sous le nom de "marbre de Thorigny" [3], le piédestal d’une statue, celle de T. Sensonius Solemnis, originaire de Vieux et qui, en 238, fut à Lyon président de l’Assemblée générale des Gaules…"

"Sous Dioclétien (284-306), le pays fait partie de la IIe Lyonnaise. La tranquillité n’y est pas absolue : les rivages reçoivent souvent la fâcheuse visite d’intrus, venus des contrées nordiques, des "Saxons". Les uns arrivent, débarquent, pillent, emportent leur butin ; il semble que ceux-ci soient d’origine danoise. On peut supposer même qu’ils avaient en des lieux propices, aménagé des dépôts pour leur rapines, en même temps places de résistance, comme la pointe de la Hague, fermée et défendue par le rempart du Hague-Dicke [4] (encore discernable)…"

Extraits de "Visages de la Normandie" par Marcel Hérubel, Hermann Quéru, Georges Huard, Georges Diard – Editions des Horizons de France Paris - 1941



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notes sur quelques communes non référencées sur la carte

Folligny

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Une ancienne voie romaine allant de Rennes (Condate) à Avranches (Legedia), Coutances (Cosedia Constantia) puis Valognes (Alauna) en passant par Hocquigny, Le Repas, Le Loreur et Cérences. Selon Emile Vivier [5] , cette voie aurait emprunté d’anciennes pistes gauloises, les romains en transformant quelques-unes en routes, en les pavant de larges dalles assurant ainsi leur solidité et leur durée. Encore en quelques endroits, elle porte le nom de « Chemin Perré » ou de "chemin Chaussé" comme à Cérences. De plus D. Levalet rapporte qu’avant 1835 au Repas près de la très ancienne chapelle placée sous le vocable de Saint Denis, furent trouvées des poteries et des monnaies romaines, des tuiles rouges à rebord, et des tombeaux qui ne renfermaient plus que des cendres.

Beuzeville-la-Bastille

Situé sur le passage de la voie romaine de Bayeux à Portbail.

Place forte assurant la défense du marais dans le cadre du plan de défense des côtes, renforcée par l’amiral Jean de Vienne lors du siège de Saint-Sauveur en 1374, âprement disputée par les Français et les Anglais lors de l’occupation anglaise de la Normandie au 15ème.

Notes

[1] Unelli ou Venelles était un peuple gaulois, installé dans le Cotentin. Leur capitale était Constantia (Coutances)

[2] Le mont Castre est un massif de grès armoricain culminant à 122 m, situé à Lithaire, qui porte les traces d’un ancien camp gaulois ou romain (Mons-Castrorum). Il est également appelé camp de César

[3] Le marbre de Thorigny est le socle d’une statue en grès et non en marbre découverte à Vieux (14). Les inscriptions gravées expliquent la carrière politique d’un haut personnage gallo-romain, Titus Sennius Sollemnis. Cette pierre découverte en 1580 est le principal document épigraphe de Normandie. Jacques de Matignon la fait transporter dans son château de Thorigny sur Vire, d’où son nom. Laissée à l’abandon pendant un siècle, elle est finalement redécouverte dans l’orangerie du château des Matignon

[4] Le Hague-Dicke serait "daté de la proto-histoire ancienne et plus particulièrement de l’age de bronze, période qui a bien marqué le paysage de la presqu’île : habitat de fonds de vallée, nombreux tumulus, enclos et limites agraires encore visibles dans le paysage…" cf Publication du Projet collectif de recherche "Archéologie, histoire et anthropologie de la presqu’île de la Hague (manche). Analyse sur la longue durée d’un espace naturel et social cohérent" Directeur de la publication Cyryl Marcigny avec la collaboration d’Emmanuel Ghesquière

[5] source : "Anciens grands chemins de l’Avranchin", Emile Vivier, Revue de l’Avranchin et du Pays de Granville, tome XXXIII, N° 199, juin 1954.