Le50enligneBIS
> Paroisses (Manche) > pqrs > Portbail > Histoire > Portbail - Notes historiques et archéologiques

Portbail - Notes historiques et archéologiques


La commune de Portbail renferme dans sa circonscription les deux anciennes paroisses de Portbail et de Gouey.

Portbail, Portus Balii, Ballia.

L’église paroissiale de Notre-Dame de Portbail est du XIe ou du XIIe siècle ; on y reconnaît encore plusieurs caractères de l’architecture romane, et notamment, à l’extrémité occidentale, un reste de muraille avec des briques de grande dimension [1]. L’abbé de Lessay en avait le patronage que l’abbaye tenait d’Anquetil de Claids, qui le lui avait donné avec plusieurs autres églises : et ecclesiam sancte Marie de Portebalio.

Guillaume, comte de Sussex, par une charte, sans date, mais qui doit être de la fin du XIIe siècle ou du commencement du XIIIe, confirme à l’abbaye de Lessay la donation de l’église de Portbail par Anquetil de Claids, avec les dîmes et les aumônes qui, dans la paroisse, dépendent de l’honneur (baromie) d’Aubigny : et ex dono Anquetilli de Cleis et Roberti, filii sui... Ecclesiam sancte Marie de Portuballio cum decimis et elemosinis que in eadem parrochia sunt de honore Albineii [2].

L’église de Portbail payait pour décimes 45 livres et dépendait de l’archidiaconé du Bauptois et du doyenné de Barneville.

Il y avait à Portbail, dans leXIVe siècle, deux chapelles : l’une, dédiée à saint Michel, était dans le cimetière ; l’autre était sous le vocable de saint Simon. Elles n’avaient aucuns revenus, non sunt dotate, dit le Livre blanc. Cette dernière fut dans un temps très-fréquentée par les pèlerins. Suivant une tradition, saint Simon y avait vécu comme ermite [3].

Le patronage de l’église de Portbail appartenait à l’abbaye de Lessay. L’abbé et le curé se partageaient par moitié les dîmes et l’autelage.

Avant la rédaction du Livre noir, il y avait eu près de l’église paroissiale, dans le manoir de l’abbé, des religieux qui officiaient dans cette église. Le curé, pour la plus grande commodité des paroissiens, allait dans la semaine célébrer l’office dans la chapelle saint Simon, placée aux limites de la paroisse. Ces religieux desservaient aussi un hôpital à Portbail, et tenebant hospitalitatem in hoc loco. Mais lors de la rédaction du Livre noir, il n’y avait plus ni religieux, ni hospice, et rarement dans la semaine on officiait dans l’église de la paroisse.

Il y avait eu à Portbail une très-ancienne abbaye ; car Richard III, duc de Normandie, affecta à la dot de sa fiancée, une abbaye nommée Portbail, auprès de la rivière de Gerefleur, avec un petit port : abbatiam nec non quœ appellatur Portbail, quœ sita est super aquam jorfluctum cum portu [4].

Cette maison religieuse qui possédait un petit fief à gage plége [5] avec certains droits seigneuriaux, devint plus tard un prieuré de Bénédictins dont les biens furent donnés à l’abbaye de Lessay qui nomma à la cure et au prieuré. Ce prieuré, qui s’est maintenu jusqu’à la révolution, payait pour décimes 56 livres.

Le prieur et le curé se partageaient la dime des blés, des légumes et une partie de l’autelage. Le curé avait en outre des produits en nature, entre autres 2 boisseaux de froment, mesure de Barneville.

En 1665, l’abbé de Lessay, patron de l’église, avait encore la moitié de la dime, et la cure valait alors 400 livres.

Gouey, Ecclesia de Goe. Quoique l’ancienne paroisse de Gouey soit aujourd’hui réunie à la commune de Portbail, elle n’en a pas moins conservé son titre ecclésiastique. Elle datait du XIe ou du XIIe siècle et avait dû être bâtie avec des pierres et des briques, provenant de constructions romaines [6]. Elle était sous le vocable de saint Martin. L’abbaye de Saint-Sauveur-le-Vicomte en avait le patronage.

L’abbé avait toute la dîme de la paroisse, excepté sur le territoire de Gruice, où elle appartenait au curé qui avait en outre l’autelage, un manoir et les aumônes, lui valant environ trois quartiers de froment. D’après le Livre noir, la cure valait 30 livres et la part de l’abbé s’élevait à 276 livres.

Lorsque le Livre blanc fut rédigé, l’abbé de Saint-Sauveur était encore patron. Il percevait les dimes sur une certaine partie de la paroisse ; sur d’autres il partageait avec l’abbé de Lessay, les curés de Portbail du Mesnil et le prieur de Portbail. Le curé avait encore des revenus en nature, entre autres 14 boisseaux et demi de froment, mesure de Gouey, ad mensuram de Goe.

En 1665, l’abbé de Saint-Sauveur était seul décimateur, et le curé était réduit à la portion congrue.

L’église payait pour les décimes 36 livres, et dépendait de l’archidiaconé du Bauptois et du doyenné de Barneville.

On comptait à Gouey deux chapelles : l’une, sous le vocable de saint Pierre, était dans le cimetière ; l’autre était au presbytère, placée sous l’invocation de saint Médard (Medardus) [7].

Antiquités Romaines

Portbail et Gouey ont dû être l’emplacement d’une station romaine, nommée Grannonum, et signalée par la Notice des dignités de l’Empire, comme se trouvant sur les côtes de la Manche et comme ayant une garnison. Portbail renferme dans son territoire les restes, d’un aqueduc souterrain qui apportait l’eau d’une source ou fontaine dite Jeannetot. On y a trouvé des restes de constructions romaines importantes avec des briques de grande dimension, des médailles, des fragments de marbres, des poteries, des sarcophages en tuf, des débris de placage, couverts de peinture.

Gouey a aussi fourni beaucoup d’objets pareils à ceux découverts à Portbail. Entre Gouey et Portbail, on a trouvé un cercueil en tuf dans lequel étaient des monnaies du XVIe siècle.

Portbail parait avoir eu une grande importance sous la domination romaine ; son port était alors très-fréquenté.

Plusieurs voies romaines aboutissaient à Portbail ; une d’elles qui, au moyen-âge a conservé le nom de Voie Romaine, conduisait du port d’Omonville-la-Rogue à Portbail-Gouey [8].

Faits Divers

En 1235, lors du partage du comté de Mortain, Louis IX se réserva Gouey (Goe).

En 1439, il se tenait le dimanche, dans le cimetière de Gouey, un marché qu’on transféra au samedi.

Le Roi y autorisa deux foires en 1454, l’une le 2 avril et l’autre le 28 octobre [9].

En 1593, Léobin du Saussey était seigneur de Portbail et de Barneville.

Nicolas du Bouillon, écuyer, sieur de Gouey, était en 1597 lieutenant-général au bailliage de Saint-Sauveur-Lendelin.

En 1463, Montfaut trouva noble à Portbail, Jean Flequet, et Roissy, en 1598, trouva noble à Gouey, Guillaume de Briroy.

En 1666, Chamillard reconnut nobles à Portbail et d’ancienne noblesse, François de Montfiquet [10]. Guillaume du Pert, Gilles, Jacques et Antoine Poërier, sieurs de Gouey, prouvèrent quatre degrés et furent maintenus.

Il reconnut nobles à Gouey Thomas et Jacques Griseline, dont la noblesse remontait à 1450 ; Nicolas de Briroy, sieur de la Comté et du Gris, Jean de Glatigny, sieur de Villodan et Nicolas-Baptiste Jouhan, qui prouva quatre degrés.

Portbail fut dans un temps le siège d’une lieutenance d’amirauté ; on y comptait de nombreuses salines.

Gouey et Portbail relevaient de l’intendance de Caen, de l’élection de Valognes et de la sergenterie de Beaumont.

Portbail, en 1722, comptait 107 feux imposables, 131 en 1726 et 1765, et 590 habitants, en 1762-70. Gouey comptait 137 feux imposables, en 1722, 131, en 1726, 113, en 1765, et 590 habitants, en 1762-70. La population réunie de ces deux localités est, en 1867, de 1864 habitants.

Source :

Notes

[1] Etudes sur le département de la Manche, par M. de Gerville, pag. 56

[2] Cette charte m’a été obligeamment communiquée par M. Dubosc, archiviste du département

[3] D’Expilly, Dictionnaire historique et politique des Gaules et de la France, tom. V, pag. 819

[4] Recueil des historiens de France, tom X, pag. 270, note A

[5] On nommait gage plége, en Normandie, la convocation que le juge faisait une fois par an, dans le territoire d’un fief pour l’élection d’un prévôt et sergent, afin de faire payer les rentes et redevances seigneuriales dues au seigneur par ses censitaires, et pour recevoir les nouveaux aveus. Tous les vassaux étaient obligés de comparaître au gage plége en personne ou par procureur.

[6] Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie, tom V, pag. 24 et suivantes

[7] Voir le Livre blanc de l’évêché

[8] Recherches sur les villes et les voies romaines dans le Cotentin, par M. de Gerville

[9] Journal de Valognes, du 14 juillet 1864, n° 28

[10] Un domaine, assis à Portbail, porte le nom de Terre de Montfiquet