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Lieusaint - Notes historiques et archéologiques


Lieusaint, Locus sanctus ; on trouve écrit Lieuxsains et Xantilocus, Locus sanctorum.

Ce nom semble indiquer que le christianisme a détruit dans cette localité quelque temple païen, et que son emplacement, consacré au vrai Dieu, a pris le nom de Lieusaint.

L’église paroissiale de Lieusaint offre la forme d’un carré oblong ; le chœur est voûté en pierre, et la nef est voûtée en bois. Le chœur au nord et la nef au midi sont éclairés par des fenêtres en ogive, longues et étroites. Les autres fenêtres sont insignifiantes.

Le mur méridional de la nef est percé de deux portes ogivales dont l’une est bouchée et dont l’autre, servant d’entrée, est surmontée d’un bas-relief représentant saint Eloi, accompagné d’un personnage qui agite un soufflet. Il existe dans le mur une crédence du XVIe siècle.

Une tour carrée et terminée en bâtière s’élève au nord entre chœur et nef. Le mur absidal est droit ; la porte à l’occident est en ogive ornée de tores dont la retombée se fait de chaque côté sur trois légères colonnes.

L’église actuelle en a remplacé une ancienne qui, elle aussi, était placée sous le vocable de saint Eloi. Elle était une des cinq paroisses qui formaient l’enclave du diocèse de Bayeux dans celui de Coutances, et qui dépendaient de l’archidiaconé [1] des Veys et du doyenné de Trévières. Cette enclave était, dit-on, le résultat d’un échange qui avait eu lieu entre les diocèses de Bayeux et de Coutances, et qui remontait à l’époque de saint Lo, évêque de Coutances. [2] Saint-Lo, issu d’une famille noble et riche, possédait dans ses domaines cinq paroisses qui se trouvaient dans le diocèse de Bayeux : il les unit à l’évêché de Coutances, du consentement de l’évêque de Bayeux qui, en échange, obtint et unit à son diocèse cinq paroisses qui sont Lieusaint, Sainte-Mère-Eglise, Chef-du-Pont, Neuville-au Plain et Vierville. [3] L’évêque de Bayeux nommait de plein droit à la cure et était seul décimateur ; le curé n’avait qu’une pension.

Il existait dans la paroisse une chapelle sous le vocable de sainte Madeleine, et qui figure sur la carte de Cassini.

Lorsque je visitai l’église de Lieusaint, je remarquai sur le mur méridional, entre chœur et nef, une inscription tumulaire que l’on regarde comme mérovingienne et que M. Leblant a ainsi publiée :

† VII. KL. JVLII
OBIIT. HERMES
SACERDOS
† VIII KL MAI
OBIIT. FRVLE
ORA. PRO BIS. _ _

Sous le larmier du mur portant cette inscription, on a découvert un grand sarcophage renfermant deux têtes. Peut-être appartenaient-elles aux deux personnages dont les noms figurent dans cette inscription.

Lieusaint, d’après M. de Gerville, était une maison royale où, sous les rois mérovingiens, on battait monnaie, marquée d’un côté de ces mots Loco sancto, et de l’autre Daco Aldo. Une de ces monnaies en or se trouve a la bibliothèque impériale.

En l’année 1859, on trouva, à peu de distance de l’église, vers le côté nord, un sarcophage gallo-romain, en plomb, que M. de Caumont a décrit et dont il a donné une vue. [4] Ce cercueil fait partie aujourd’hui du musée d’antiquités de la ville de Saint-Lo.

Avant cette découverte, on avait signalé, à l’est de l’église, un tombeau mérovingien en pierres ; sur l’une des pierres provenant d’une base de colonne, on lisait le mot Synnovira. Les pierres employées à ce tombeau avaient évidemment été prises dans les débris d’un monument romain. Ce fait, et beaucoup d’autres du même genre, prouvent que les habitants du pays occupé précédemment par les Romains ont utilisé les ruines des monuments que ces peuples avaient élevés. Ce cercueil est déposé à la bibliothèque publique de Valognes.

  • M. de Gerville indique deux voies romaines, qui venant d’Alleaume passaient par Lieusaint, et se rendaient l’une à Portbail et l’autre à Pierrepont.
  • On trouve à Lieusaint un colombier qui remonte au commencement du XVIIe siècle. Ce fut Sanson Lefebvre, sieur de Beaulieu, à Lieusaint, en la vicomté de Valognes, qui, en 1604, obtint la permission "d’édifier ung colombier a pied, sur tel endroict de ladicte seigneurie qu’il advisera". [5] On sait qu’en Normandie le propriétaire du fief de haubert possédait seul le droit d’avoir un colombier. [6]

En 1463, Montfaut trouva noble à Lieusaint Guillaume de la Haie.

Chamillard, en 1666, y trouve Antoine de Brix, sieur de Brimont, Gilles et Louis Dancel et Jean Couillard, sieur du Longpré et de Hautmesnil : le premier, anobli en 1543 ; les Dancel, en 1574, et le troisième, en 1576.

La paroisse de Lieusaint dépendait de l’intendance de Caen, de l’élection et de la sergenterie de Valognes. Masseville, en 1722, lui comptait 59 feux, et Saugrain 268 habitants, en 1726. Sa population, en 1866, est de 300 habitants.

Source :

Notes

[1] NDLR : subdivision d’un diocèse

[2] Saint-Lo, élu évêque de Coutances en 525, mourut en 566

[3] De Bras, dans ses Recherches et antiquités, pag. 85, compte Sainte-Marie-du-Mont comme cinquième paroisse enclavée et ne fait pas figurer Lieusaint ; cependant le Livre noir de l’évêché de Coutances ne mentionne pas Lieusant, mais l’église de Sainte-Marie du-Mont s’y trouve sous le nom de Sainte-Marie de-Poupeville, ancien nom de la paroisse. Sainte-Marie-du-Mont ne figure pas non plus dans le Livre pelut de l’évêché de Bayeux, rédigé vers 1356, au nombre des paroisses enclavées, tandis que celle de Lieusaint y est ainsi indiquée : Ecclesia de Locis sanctis in Const. Diœcesanus Bajocensis. Voy. Hermant, Histoire manuscrite du diocèse de Bayeux, à là bibliothèque de Caen. v° Doyenné de Trévières

[4] Bulletin monumental, publié par M. de Caumont, Tome XXXI, p. 131

[5] Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie, Tome XVIII, pag. 70, 2e colonne

[6] Voir un excellent article sur le droit de colombier sous la Coutume de Normandie, par M. J. Cauvet, dans les Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie, Tome XXIV, pag. 383