Le50enligneBIS
> Paroisses (Manche) > tuv > Trelly > Histoire > Trelly - Notes historiques et archéologiques

Trelly - Notes historiques et archéologiques


Trelly, Trely, Traylis, Trailliacum, Trelleyum.

L’église de Trelly offre un carré oblong, et se compose du chœur et de la nef.

Le chœur est du XIIIe siècle. Il est éclairé de chaque côté par des fenêtres longues, étroites et à ogives. Il est voûté en pierres. Ses arcs doubleaux, formés d’un tore entre deux cannelures, reposent sur des colonnettes dont les chapiteaux sont ornés de volutes et de petites fleurs légèrement épanouies. Leurs points d’intersections sont garnis de fleurons.

Le mur absidal est droit, et se termine en forme de fronton triangulaire. Il est percé d’une fenêtre sans intérêt.

Les colonnettes du chœur sont en partie cachées par une boiserie qui tapisse les murs, et qui doit avoir été placée dans la première moitié du XVIIIe siècle.

La tour, entre chœur et nef, est de la même époque que le chœur. Elle est quadrilatère, et se termine par un toit en bâtière. Sa voûte est en pierres, et les arceaux tombent sur des colonnes avec chapiteaux, ornés, les uns de volutes ou de feuilles recourbées, les autres de figures grimaçantes. La base des colonnes se compose d’un tore qui manque un peu de rondeur, et d’une scotie assez bien évidée. La partie inférieure de la tour est éclairée dans l’église par deux fenêtres à ogive, dont l’une est trilobée.

La nef parait être de la dernière époque, et n’offre aucun intérêt. Elle est voûtée en bois, et les fenêtres qui l’éclairent sont carrées et sans caractère. Cette partie de l’église doit être de 1741 ; c’est du moins cette date qu’on lit au-dessus de la porte principale.

On a eu le mauvais goût de couper et de mutiler des colonnes et des chapiteaux pour placer deux petits autels et le toit ou dais qui couvre la chaire. MM. les curés devraient bien user de toute leur influence pour empêcher ces mutilations, ainsi que de prétendues restaurations, si contraires au bon goût.

J’ai lu sur une pierre tumulaire, dans le cimetière, l’inscription qui suit :

CY GIST LE CORPS DE
M. GVILLAUME LETAROVILLY
Ptre VICAIRE DE TRELLY
DÉCÉDÉ LE 24 AVRIL 1669.
P. DIEV P. LVY P. A
.

L’église de Trelly est sous le vocable de saint Germain. Elle dépendait de l’archidiaconé de la chrétienté et du doyenné de Cérences. Elle était taxée à 80 livres de décime. Le patronage était laïque, et le seigneur du lieu nommait à la cure.

Dans le XIIIe siècle, le patron de l’église, Guillaume Murdac, avait deux gerbes sur son fief ; le curé avait le surplus des dîmes, à l’exception de la dîme des laines, qui appartenait aux trois chanoines prébendés de Coutances. La cure valait alors 75 livres.

Dans le siècle suivant, le curé avait la troisième gerbe des blés dans toute la paroisse avec le casuel. Il avait, avec sa demeure, environ deux vergées de terre. Il payait chaque année pour la chape de l’évêque six sous et quatre deniers.

Il y avait à Trelly deux chapelles : l’une sur la terre de la Motte, et l’autre au Manoir. La première tombe en ruines. L’autre, élevée par la piété des anciens seigneurs, et près de leur manoir, fut rétablie, en l’année 1408, par Guillaume de Meurdrac, échanson de Charles VI, roi de France, et Guillaume de Meurdrac le jeune, seigneur de Contrières, sous l’invocation de saint Jean-Baptiste et de sainte Catherine, « en la révérence de Dieu et de sa glorieuse mère, et de toute la cour du paradis, à charge par l’hotel-dieu de Coutances d’y faire acquitter trois messes chaque semaine, et aux fêtes de saint Jean-Baptiste, aux quels jours il devoit y avoir matines, messes à notes et vêpres. » Une inscription qui doit exister dans cette chapelle, que je n’ai pu visiter, rappelle ce fait historique. [1]

Le chapitre de la cathédrale de Coutances avait trois prébendes à Trelly.

La première, nommée la Grande prébende, consistait en un fief, ainsi qu’en rentes seigneuriales en argent et en nature. Elle valait, en l’année 1652, 2,000 livres.

La seconde, appelée la prébende de Charpaigne, valait 250 livres de rentes seigneuriales.

La troisième, appelée la prébende de Saint-Jean, consistait en 200 livres de rentes seigneuriales. [2]

Il parait que, dans le cours du XIIe siècle, le chapitre, qui avait eu à titre de prébende, d’ancienne possession, Trelly, avec l’église, les moulins et quelques appendices, n’avait plus qu’un fief, tenu par Hugues Meurdrac, fief qui, en 1789, se réduisait au moulin de Coësel.

Faits historiques

Deux auteurs, Brompton et Duchesne, citent au nombre des seigneurs normands qui accompagnèrent Guillaume à la conquête de l’Angleterre le sieur de Traylis.

On trouve que, dès le XIIe siècle, Richard Meurdrac, dont la famille était très-étendue et très-riche en Normandie, était seigneur de Trelly. Pendant plusieurs siècles, la seigneurie de Trelly appartint à ses descendants.

Suivant le registre des fiefs de Philippe-Auguste, Geoffroy Meurdrac tenait du roi un fief à Trelly : Gaufridus Meurdrac tenet de eodem (rege) feodum unius militis apud Trailli.

Son fils, nommé Gautier, était, dans les premières années du XIIIe siècle, un puissant baron. Sa seigneurie se composait de neuf fiefs de chevaliers qu’il tenait de la baronnie de Verdun, de honore Verdun.

Un Guillaume de Trelly figure au nombre des quatre chevaliers que l’évêque de Coutances, comme baron de Saint-Lo, envoya, en l’année 1274, à l’armée de Philippe-le-Hardi, fils de Saint-Louis. [3]

Dans le cours du XVIIe siècle, on comptait à Trelly cinq fiefs nobles. Le fief du manoir de Trelly ; le fief de la Grande prébende ; le fief de Charpaigne ; le fief de Saint-Jean, et le fief de Beauquesne, appartenant au chapitre. On voit dans des aveux de l’année 1540 que ce fief ou tènement avait été donné au chapitre par défunt de bonne mémoire messire Louis Herbert, évêque d’Avranches. [4] Ce prélat mourut en l’année 1525.

On y comptait aussi deux moulins : le moulin du Coisel, faisant partie de la grande prébende, et le moulin de Trelly, appartenant à Letellier, seigneur et patron du lieu. Ils étaient l’un et l’autre d’un revenu de 60 livres.

On trouve, dans le XVIIIe siècle, Charles-François-Louis de Berenger, seigneur et patron de Trelly. Sa veuve, Marie-Suzanne-Jeanne-Renée-Scholastique Letellier, devint dame et patronne de Trelly.

Son fils, Louis-Charles-François, comte de Berenger, seigneur et patron de Hérenguerville, Montaigu et Canteloup, le devint aussi de Trelly. Il épousa Louise-Catherine-Marguerite de Ruallem.

Marie-Pierre-Frédéric, comte de Berenger, leur fils, acquit, par ses études et ses recherches historiques, une connaissance profonde de l’histoire de son pays. La Société des antiquaires de Normandie, dont il fut un des membres les plus distingués, le compta au nombre de ses directeurs. Il est mort dans le mois d’avril 1841, au milieu des plaisirs de l’élude, laissant des manuscrits précieux pour l’histoire du Cotentin et de la province de Normandie.

Pendant qu’il servait dans les rangs de l’armée, comme capitaine de dragons, il fut fait chevalier de la Légion-d’Honneur. Maire de Trelly, il se dévoua aux intérêts de sa commune, dont les habitants le respectaient comme un père.

Les restes de cet homme de bien reposent près du manoir de Trelly, dans la chapelle de Meurdrac, restaurée par ses soins.

René Boudier de la Jousselinière naquit à Trelly, en l’année 1634. Auteur de plusieurs ouvrages, il a aussi laissé des poésies diverses. Voltaire, dans son Siècle de Louis XIV, parle assez avantageusement de ce poète, dont voici une épigramme :

Avec cent mille francs qu’on vous a fait prêter,
Vous voilà revêtu d’une charge honorable,
Dont vous pourriez être capable,
Si la capacité se pouvait emprunter
.

Trelly a encore vu naître, en 1752, Jean-Baptiste Lechevalier, qui, sans rester étranger au mouvement de la littérature moderne, fut un savant versé dans l’étude de l’antiquité. Il est auteur de plusieurs ouvrages, cités comme annonçant une grande érudition.

Source :

Notes

[1] Histoire des Evêques de Coutances, par l’abbé Le Canu, p. 469.

[2] Histoire des Evêques de Coutances, par l’abbé Le Canu, p. 456.

[3] Mss. de Lefranc.

[4] Mss. de Toustain de Billy.